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Après
des études de mathématiques à l'université de Tübingen, Kepler enseigna les
mathématiques à Graz (Autriche). Passionné d'astronomie, il étudia et confirma
les idées héliocentriques avancées par Copernic,
s'opposant au géocentrisme de Ptolémée.
Poursuivi tant pour ces idées que pour sa religion (protestante), Kepler se réfugie (1600) à Prague, invité par l'astronome danois Tycho Brahé (1546-1601, à droite) où il poursuit ses recherches. Les successeurs du pape Paul V (1550-1621) renonceront à poursuivre les idées héliocentriques, mais il fallut attendre le pape Jean-Paul II et l'an 1978 (soit 350 ans) pour que l'Église réhabilite Galilée sans pour autant reconnaître clairement son erreur.
Renonçant à voir dans l'explication de l'harmonie céleste la présence platonicienne des fameux polyèdres réguliers, il étudie les nombreuses observations de Brahé relatives à la trajectoire de la planète Mars pour laquelle il remarque une excentricité, considérée comme une anomalie dans la mesure où l'on croyait jusqu'alors à des trajectoires circulaires. Kepler découvre alors ses célèbres lois sur le mouvement des planètes (Astronomia Nova, 1609-1618) : elles décrivent des ellipses et non des cercles. Il en est de même des petites planètes tournant autour d'une "plus grosse", comme la Lune autour de la Terre, les satellites (du latin satelles, satellitis = garde du corps).
Kepler fut, avec Descartes et Newton, un des grands savants de cette époque qui développèrent les sciences en faisant grandement progresser les mathématiques. On lui doit le principe de l'inertie : un point immobile soumis à aucune action extérieure reste immobile.
étude des coniques par foyer et directrice : »
Polyèdres réguliers étoilés de Kepler : |
Kepler découvrit deux des 4 polyèdres réguliers étoilés portant aujourd'hui son nom. Deux siècles plus tard, Poinsot découvrit les deux autres :
Polyèdres étoilés de Kepler & Poinsot : »
Les lois de Kepler (1609-1618) : |
La première de ces lois exprime que les
planètes (P) décrivent
une orbite
elliptique dont un des
foyers
est le soleil (S). sur le schéma, l'aspect elliptique est volontairement
exagéré. Dans la "réalité", l'excentricité de l'ellipse
étant très faible, la trajectoire est quasiment circulaire, !
» orbite : du latin orbis = rond qui a fourni orbita = trace d'une roue, ornière.
La seconde énonce que le rayon vecteur
joignant S à P, engendre une aire proportionnelle au temps
employé pour la décrire.
En particulier, en des
temps de parcours égaux, les aires balayées sont
égales et la vitesse de révolution d'une
planète n'est donc pas constante : elle
accélère en hiver en se rapprochant du Soleil. Sa vitesse est
maximale à la périhélie; elle ralentit en
été, en s'en éloignant. Sa vitesse est minimale
à
l'aphélie.
La troisième (1618) : le carré du temps de révolution sidérale d'une planète est proportionnel au cube du grand axe de sa trajectoire elliptique.
Photo prise sur le site du
cadran solaire géant (autoroute A9,
aire de Tavel, Gard)
➔ Noter que l'explication donnée par Kepler de cette théorie elliptique n'est pas gravitationnelle (ce sera le fait de Newton) mais magnétique : le Soleil provoquerait une sorte de tourbillon magnétique forçant les planètes à tourner autour de lui et ces dernières exerceraient également sur le Soleil une attraction ou une répulsion (à la façon d'un aimant) suivant le pôle qu'elles lui présentent.
Excentricité des orbites planétaires : |
Une conique, ellipse (orbite planétaire) ou parabole, hyperbole (trajectoires des "bolides" de l'espace comme certaines comètes et astéroïdes) peut être définie au moyen d'un foyer F et de deux paramètres positifs p (appelé justement paramètre) et e (excentricité). En coordonnées polaires, avec le foyer comme pôle (origine), l'équation de la conique est alors de la forme :
r est le rayon-vecteur. Par rayon vecteur Kepler entend le segment orienté d'origine le foyer F, d'extrémité le point de l'ellipse considérée. Le terme se généralisera à tout "vecteur" AM où A est un point fixe et M un point mobile d'une courbe donnée.
L'excentricité de l'orbite elliptique terrestre est très faible (0,017) : c'est dire que la trajectoire est quasi circulaire. On comprend la difficulté des astronomes, en l'absence de nombreuses observations et de matériels d'observation précis, à imaginer des trajectoires elliptiques (figures connues cependant depuis l'antiquité grecque : Ménechme, Apollonius de Perge).
Les plus fortes excentricités sont celles de Mercure (0,2) et de Pluton (0,25). Celle de Mars est de l'ordre de 0,1 (0,0934) : ce n'est pas négligeable et avant sa découverte des trajectoires elliptiques, Kepler émit l'idée que Mars décrivait un folium.
»
Le 30 août 2003, Mars est passée au plus proche de la Terre (55 millions de km)
depuis 57617 ans avant J.-C. : C'est une opposition périhélique : la Terre (en
bleu) se trouve exactement entre Mars (en rouge) et le Soleil à l'instant où
Mars est au plus près de celui-ci (périhélie = position la plus proche du
Soleil, aphélie = position la plus éloignée). La distance de Mars au
Soleil varie sensiblement entre 206 et 249 millions de km (périhélie/aphélie),
soit une moyenne de 228 millions de km. Elle décrit son orbite elliptique en 688
jours terrestres.
Kepler écrivait en latin; on lui doit l'usage systématique des termes ellipse : ellipsis, forgé sur le mot grec elleipsis = manque, déficience. L'excentricité de l'ellipse est inférieure à 1. Le premier usage de ce terme est dû à Apollonius de Perge et on l'utilise déjà couramment depuis la Renaissance). On doit également à Kepler les termes foyer (focus) et excentricité (excentricitas). Notons cependant que ces mots latins existaient déjà indépendamment de ces concepts.
Équation de Kepler : |
Il s'agit d'une équation relative aux orbites planétaires liant l'excentricité (e = OF/OA = c/a), l'anomalie excentrique (ε = ^FOP') et l'anomalie moyenne (m) d'une planète P (la Terre par exemple) en orbite autour d'un astre F (notre Soleil par exemple) :
m = ε - e.sin ε , m et ε exprimés en radians
Sur le schéma, le cercle bleu est le cercle principal (image de l'orbite elliptique dans l'affinité de rapport a/b), φ = ^AFP est l'anomalie vraie.
On la calcule facilement au moyen de e et ε : OA = OP' est le demi-grand axe, b = est le demi-petit axe :
∗∗∗
Vérifier que
tan φ
= (1 - e2)½cos
ε/(cos
ε- e)
☼
Problème de Kepler : |
L'anomalie moyenne m correspond à un angle ^AFP'' définie par un astre virtuel P'' tournant à vitesse angulaire constante autour de F et ayant la même période de révolution que P. La connaissance de m permet une localisation très simple de P à tout moment dans le ciel, mais le calcul de l'anomalie excentrique n'est pas simple.
Lagrange s'attaqua au problème et donna une solution sous forme de développement en série entière des puissances de l'excentricité e en faisant usage d'un théorème d'inversion portant son nom. Cauchy et Bessel en donneront une solution plus élaborée (ce dernier au moyen des fonctions portant également son nom) : » Réf. 1 à 3
» Taylor
Pavages, empilement de sphères & conjecture de Kepler : |
En 1610, Kepler étudie certaines formes géométriques de la nature comme les flocons de neige et les nids d'abeille (hexagonaux). A surface égale, parmi toutes les courbes fermées, le cercle est celui qui possède le plus petit périmètre mais il ne pave pas le plan (il laisse des trous, coloriés en gris ci-dessus) :
L'abeille trouve en l'hexagone régulier un pavage optimal : une aire maximale pour un périmètre minimal parmi les 3 pavages réguliers possibles du plan (triangles équilatéraux, carrés, hexagones réguliers). Ci-dessous 4√3 désigne la racine 4ème de 3, autrement dit 31/4 :
aire | côté si aire = 1 | périmètre | périmètre approché | |
triangle équilatéral de côté c | c2√3/4 | 2/ 4√3 | 6/ 4√3 | 4,56 |
carré de côté c | c2 | 1 | 4 | 4 |
hexagone de côté c | 3c2√3/2 | 2/√6 4√3 | 2√6/ 4√3 | 3,72 |
Le sujet fut étudié par l'américain Thomas Callister Hales (université de Princeton) qui prouva en 2000 (réf. 4) que :
Toute partition du plan en pavés d'égale
surface et de périmètre minimal est celle
du nid d'abeille
c'est à dire le pavage hexagonal régulier.
∗∗∗
Pour un périmètre donné p, comparer les aires du
carré et de l'hexagone régulier
☼
Kepler en vient à se demander :
Comment empiler un ensemble de sphères afin que le volume occupé soit le plus petit possible
et conjecture que la solution est celle des enfants jouant aux billes dans les cours de récréation ou des militaires empilant, à cette époque, des boulets de canon. Ce problème relève de la cristallographie (mailles et réseaux) et fut donc aussi étudiée par les chimistes. Une maille est un ensemble fini de points (les nœuds) de l'espace constituant un motif 3D. La répétition de ce motif par translation constitue un réseau.
D'apparence simple, étudié par
Gauss (1831) et
de nombreux mathématiciens contemporains, ce problème très difficile n'a trouvé une solution
qu'en 1997-98 par Thomas C. Hales et son élève S. Ferguson, confirmant les avancées sur le sujet depuis
Gauss :
Tout empilement de sphères dans l'espace euclidien de
dimension 3 a une densité au plus égale
à la densité π/√18= π/3√2
≅ 0,74
de l'empilement cubique à faces centrées.
Hilbert a généralisé et formalisé ce problème dans son 18è problème.
Nombres pyramidaux :
L'empilement est dit cubique à faces centrées pour exprimer qu'on peut l'obtenir à partir d'un réseau cubique en plaçant des sphères identiques centrées en chaque nœud du réseau, le rayon étant calculé afin qu'elles soient tangentes à celles qui leurs sont adjacentes. Par densité, on entend la limite du rapport v/V où v désigne le volume de l'empilement et V celui du cube de côté c qui le contient lorsque c tend vers l'infini.
Le nombre de sphères (ou de billes) constitue un nombre pyramidal polygonal.
Si la base est un triangle, on parle de nombre pyramidal triangulaire également appelé nombre tétraédrique.
Si la base est un carré, il s'agit nombre pyramidal carré. Il s'agit de la superposition de nombres polygonaux.
Dans le second cas, si le côté de la base contient n sphères, le nombre total de sphères est la somme des carrés des entiers naturels de 1 à n, à savoir :
n(n + 1)(2n + 1)/6
Concernant le premier cas, la formule donnant le nombre total de sphères est :
n(n + 1)(n + 2)/6
et on pourra se référer à la page consacrée à Manjul Bhargava ou, directement à cet exercice corrigé.
Un peu de cristallographie : »
Densité des empilements de sphères en dimensions 8 et 24, par
Joseph Oesterlé (IHP, juin 2017)
∗∗∗ empilement de cercles , empilement de sphères
Combien y a-t-il de boulets dans cette formation
pyramidale ? Rép. : 465
➔ Pour en savoir plus :
Problème de Kepler : pages d'Alexandre Vial (univ. techno. de Troyes) : http://kaekoda.free.fr/bup/bup2_html/bup2_htmlse6.html
Problème de Kepler : sur ADS (Astrophysics Data System),
Moyen de
résoudre graphiquement le problème de Kepler
par
Edmond Dubois (officier de marine et astronome français, 1822-1891) :
http://articles.adsabs.harvard.edu/full/1863AN.....59..177D
Problème de Kepler : la solution de Lagrange (par son théorème
d'inversion), page de M. Müller :
http://info.ifpan.edu.pl/firststep/aw-works/fsII/mul/mueller.html
Excentricité orbitale (page Wikipedia) : https://fr.wikipedia.org/wiki/Excentricité_orbitale
Théorème du nid
d'abeille, preuve par Hales de la conjecture de Kepler (Honeycomb
conjecture) :
http://arxiv.org/pdf/math/9906042v2.pdf
Empilement compact par Christine Bachoc (univ Bordeaux) : http://www.ufr-mi.u-bordeaux.fr/~bachoc/Mathenjean.pdf
Empilement compact sur Numdam, Séminaire Bourbaki, articles de
Joseph Oesterlé :
http://archive.numdam.org/article/SB_1998-1999__41__405_0.pdf
Empilement compact sur CultureMath, page de Denis Auroux (CNRS / Polytechnique :
http://www.dma.ens.fr/culturemath/maths/pdf/geometrie/empilement.pdf