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Astronome
et physicien, fils d'un diplomate amateur de sciences, Huygens fit des études de
droit et de mathématiques à Leyde (Leiden : au sud de la Hollande) et à Breda.
Présenté à Mersenne et à
Descartes par son père, ces rencontres seront décisives : il se tourne vers
les mathématiques et la recherche scientifique. A l'invitation de Colbert
(1665), Huygens s'établira en France jusqu'en 1681 et sera membre de l'Académie
des Sciences.
Travaux en optique où il découvre le premier la nature ondulatoire de la lumière (dès 1678, publié en 1690) expliquant ainsi les effets de réfraction et de diffraction. Au moyen d'une lunette astronomique de sa fabrication, il découvrit (1656) les anneaux de Saturne pressentis par Galilée et son premier satellite (le plus gros : Titan, 5150 km de diamètre).
➔
Jean-dominique Cassini en découvrira 4 autres (entre 1671 et 1684). Saturne
est la 6ème planète du système solaire, en moyenne à 1,5 milliards de km de la
Terre, diamètre : 9 fois celui de la Terre, température au sol : -160°.
Il fallut attendre les sondes américaines Voyager (1980 à 1981) pour reconnaître une multitude d'anneaux et dénombrer 20 satellites de cette planète. Aujourd'hui (2004) on en dénombre plus de 30. A droite, image de Saturne (» réf. 4).
» La mission Cassini-Huygens lancée en 1997 par la NASA avec la collaboration de l'Agence spatiale européenne a placé le module américain Cassini en orbite autour de Saturne en juillet 2004. La sonde européenne Huygens a continué sa route vers Titan et s'est posée avec succès sur le satellite le 14 janvier 2005 d'où elle a transmis des photos et des analyses du sol. En juillet 2006, on put affirmer, grâce à Cassini que les apparences hydrauliques ("rivières", "mers", "nuages", "pluies") sont constituées de méthane liquide !
Huygens définit les notions de force centrifuge et de moment d'inertie, énonce les lois du pendule qui seront utilisées dans la construction des horloges dont il sera l'inventeur (1657). On lui doit aussi l'invention du ressort spirale permettant la construction des montres, ainsi que l'auteur de la première théorie sur les chocs élastiques (1660).
Statistique et probabilités : |
Huygens contribua avec Pascal au développement du calcul des probabilités. Son traité De ratiociniis in ludo aleae que l'on peut traduire par Raisonnement sur les jeux de dés (1657) constitue le premier important traité sur le calcul des probabilités.
Le mot latin alea désigne un jeu de dés. Jouer aux dés se disait ludere alea (ludere = jouer a donné ludique en français). Par extension, le résultat de ce jeu étant incertain, alea a signifié hasard, chance, sort. On utilise encore aujourd'hui la fameuse phrase de Jules César s'écriant alea jacta est (les dés sont jetés, le sort en est jeté) avant de traverser le Rubicon, marcher sur Rome et renverser Pompée, pour signifier, c'est décidé, trop tard pour faire demi-tour. Aléatoire nous vient de aleatorius = soumis au hasard. Utilisé en droit civil (1596, source Le Robert de la langue française), il n'apparaît en mathématiques qu'au 19è siècle.
Dans son traité, Huygens précise notamment les notions fondamentales que sont :
La moyenne ou espérance mathématique :
Il s'agit de la moyenne pondérée des valeurs d'une série X de données statistiques x1, x2, x3, ..., xn, généralement notée E(X), E pour espérance (» Pascal) ou X ou m (m comme moyenne) :
Barycentre d'un système de points pondérés : »
Lien fréquence / probabilité :
➔ ni/Σni est la fréquence de la valeur xi de la série X. En termes probabilistes, le nombre ni/Σni correspond à la probabilité d'apparition (événement) de la valeur xi. La série X de données prend le nom de variable aléatoire X (» note ci-dessus) prenant n valeurs xi avec la probabilité Prob(X = xi) = pi et son espérance mathématique est :
∗∗∗
a) Justifier que si une série X = (xi) est
constante : xi = k pour tout i, alors E(X) = k.
b) Vérifier que l'espérance mathématique est une forme linéaire : E(X + Y) =
E(X) + E(Y) et pour tout réel k : E(kX) = k.E(X)
Pascal et la notion d'espérance mathématique de gain : »
Variance, écart-type :
La variance d'une série statistique (ou, plus rarement, la fluctuation) est la moyenne des carrés des écarts par rapport à la moyenne m des données. En termes de variable aléatoire :
On utilise les carrés des écarts et non les écarts eux-mêmes afin d'éviter une correction fallacieuse entre des écarts positifs et négatifs. L'usage de l'écart moyen arithmétique n'a pas été retenu car peu opérationnel de par les valeurs absolues et son absence de propriétés additives en présence de variables indépendantes.
L'écart-type (ou écart quadratique moyen) sera formalisé ultérieurement par Pearson sous le nom de standard deviation (déviation standard). Il s'agit de la racine carrée de la variance, généralement noté σ :
La connaissance de l'écart-type d'une série est fondamental car ils permet de mesurer la dispersion autour de la moyenne : globalement, les valeurs significatives de la série se trouvent dans l'intervalle [m - σ, m + σ]. Les valeurs en dehors de cet intervalle s'interprètent comme marginales.
La moyenne trimestrielle d'une classe en mathématiques n'a guère de sens tant que l'écart type n'est pas précisé. Si cette moyenne est de 11, rien n'indique la présence dans cette classe d'élèves faibles ou brillants en mathématiques. L'écart-type apporte une information supplémentaire : un écart-type de 4 signifiera que l'éventail significatif des notes se situe dans l'intervalle [10 - 4, 10 + 4] = [6,14]. L'ensemble des autres notes, donc faibles ou fortes, sont marginales (au sens statistique). Voir l'exercice ci-après.
On peut voir le lien entre ces définitions et la physique : si E(X) correspond au centre de gravité d'un système de points pondérés, E(X2) n'est autre que le moment d'inertie (par rapport à l'origine), justement défini par Huygens. V(X) apparaît ainsi en tant que le moment d'inertie des mêmes masses par rapport à leur centre de gravité :
Formule de Huygens :
Également dite de Koenig (König), cette formule s'écrit :
V(X) = E(X2) - [E(X)] 2
Preuve : Posons m = E(X). Les propriétés de linéarité de l'espérance mathématique permettent d'écrire V(X) = E(X - m)2 = E(X2) - E(2mX) + E(m2) = E(X2) - 2mE(X) + m2 = E(X2) - 2m2 + m2 = E(X2) - m2.
∗∗∗
Vérifier que la variance vérifie pour tous réels a et b :
V(aX + b) =a2V(X)
En termes de série statistique x1, x2, ..., xN , ni désignant l'effectif partiel de la donnée xi, la formule s'écrit :
On voit alors que cette formule dérive d'un théorème de mécanique (dit, lui aussi de Huygens ou de Koenig) selon lequel le moment d'inertie, par rapport à un point origine O, d'un système S pondéré (xi, ni) de masse totale N est égal au moment d'inertie par rapport au centre de gravité G de S, augmenté du moment d'inertie par rapport à O d'une masse appliquée en G et égale à celle de S. Dans le cas probabiliste, N = 1 (somme des probabilités).
Résultats plus généraux dans le cas d'un couple statistique : » Cas d'une variable aléatoire continue : »
∗∗∗
Exemple : voici un ensemble de 19 notes. La moyenne est m = (3 + 5 + 14 + ... +
34 + 20)/19 = 212/19
≅ 11,158, que
nous arrondirons à 11.
xi 3 5 7 8 9 10 11 12 15 17 20 Total ni 1 1 2 1 2 2 3 1 3 2 1 19 ni x xi 3 5 14 8 18 20 33 12 45 34 20 212 xi2 9 25 49 64 81 100 121 144 225 289 400 /// ni x xi2 9 25 98 64 162 200 363 144 675 578 400 2718
La moyenne laisse penser que le groupe a un niveau acceptable. Voyons cela de plus près. La variance est V = 2718/19 - 11,1582 ≅ 18,55. L'écart-type, sa racine carrée, est s = 4,307... ≅ 4,5. L'écart-type est élevé : le groupe n'est pas homogène car on peut considérer que l'éventail significatif des notes est l'intervalle [m - s, m + s] = [11 - 4,5;11 + 4,5], soit : [6,5;15,5]. Les autres notes sont marginales (élèves faibles ou brillants...).
! Les calculatrices permettent de ne pas arrondir les résultats intermédiaires et d'éviter un résultat final faussé. En arrondissant de suite la moyenne à 11, on obtient une variance de 22,05 conduisant à un écart type s = 4,2 qui, lui sera arrondi à 4 : un demi-point de moins. Pas trop grave dans notre cas, mais les accumulations d'erreurs d'arrondi peuvent devenir dramatiques. Voir, par exemple, cette page.
∗∗∗ Étude d'un tableau statistique #1
Médiane, fractiles (quartiles, déciles, centiles, etc.) d'une série statistique et programme JavaScript : »
La théorie des enveloppes, des développées et des développantes de courbes : |
Étudiant la courbure des courbes liée aux problèmes d'élasticité, Huygens développe... des notions nouvelles :
L'enveloppe d'une courbe est une courbe (C) définie par un ensemble de courbes (ci), de sorte que chacune d'elles soit tangente en au moins un point de (C) et qu'en tout point de (C), il existe une courbe (ci) tangente à (C). Notons que dans l'espace, on peut aussi concevoir une surface en tant qu'enveloppe d'une famille de plans.
La développée (G) d'une courbe (C) est l'enveloppe de ses normales : en chaque point de (G), il existe une normale à (C) tangente à (G) et toute normale de (C) est une tangente à (G).
Rappelons que la normale en un point Mo(xo, yo) d'une courbe est la perpendiculaire à la tangente en ce point (lorsque cette dernière existe) :
» Tangente & normale à une courbe (généralités)
➔ Ci-dessous la développée d'une l'ellipse, en tant qu'enveloppe de ses normales. On démontre que c'est l'image d'un astroïde par une affinité orthogonale : affine d'astroïde. C'est aussi une courbe de Lamé.
Concernant la première affirmation, il suffit de rechercher l'équation générale des normales à une ellipse d'équation x2/a2 + y2/b2 = 1 et d'utiliser la méthode générale de la recherche d'une enveloppe de droites. Lorsque a > b, comme dans le cas présent, l'équation pourra se mettre sous la forme x = (c2/a)cos3t , y = (c2/b)sin3t , avec c2 = a2 - b2.
Développée (cas général) et cas de l'ellipse : »
➔ De par sa définition, la développée d'une courbe est aussi l'ensemble de ses centres de courbure. Notons ici que la développée du cercle est réduite à son centre. Huygens constata que la développée d'une cycloïde est une cycloïde isométrique.
Une développante d'une courbe (C) est une courbe dont la développée est (C). On peut donc dire qu'une courbe est la développée de ses développantes (non uniques car elle dépendent du point choisi comme origine de mesure des arcs de courbe).
Développante d'une courbe (cas général) : »
Ces travaux le mènent ainsi à reconnaître (1691), avec Leibniz et les frères Jean et Jacques Bernoulli, suite à un défi de ce dernier, la véritable nature d'une courbe observée depuis des millénaires et étudiée sans succès par Galilée, qui la tenait pour parabole, à savoir la chaînette (le terme catenary fut utilisé par Huygens) dont la développée de la tractrice. La chaînette n'est autre qu'un cosinus hyperbolique subissant une affinité et une homothétie : y = a.cosh(x/a).
Les développantes de cercle trouvent une utilité importante dans la fabrication des engrenages : leurs dents épousent cette forme pour assurer des contacts tangentiels minimisant les frictions.
➔ Pour en savoir plus :
Saturne sur le site de l'observatoire
du Pic du Midi
Saturne sur le site PGJ Astronomie de Gilbert Javaux :
http://perso.wanadoo.fr/pgj/planetes/saturne.htm