ChronoMath, une chronologie des MATHÉMATIQUES
à l'usage des professeurs de mathématiques, des étudiants et des élèves des lycées & collèges

La Tractrice

Ce problème rappelle les anciens chemins de halage où des chevaux, en se déplaçant le long des canaux, tiraient des embarcations, d'où son nom. Cette courbe fut étudiée par Isaac Newton (1676) et par le mathématicien et physicien hollandais Christian Huygens sous le nom de tractoria.

Considérons un point "pesant" T (comme disent les physiciens), tiré en M au bout d'un fil de longueur a. M se déplaçant linéairement :

Quelle est la trajectoire (Γ) du point T ?

On se place dans un repère orthonormé (figure ci-dessous) : M se déplace sur [Ox); au départ, M est en O et T est en A, sur l'axe des ordonnées. Cherchons une équation paramétrée de (Γ).

Dans le repère considéré, cette courbe est caractérisée par TM = a = OA et par sa tangente en T dirigée suivant le vecteur TM. Posons t = ^(Mx,MT), angle orienté de vecteurs, et T(x,y) avec x = OM = f(t) et y = HT = g(t). Le réel t décrit l'intervalle [π/2,π[. On a g(t) = a.sin t.

Le calcul de x = f(t) est plus subtil; le coefficient directeur de la tangente en T à (Γ) est dy/dx. C'est d'une part celui de la droite (TM), à savoir tan^(Ox,MT) = ^(Mx,MT) = tan t et d'autre part  g'(t)dt/f '(t)dt = y'/x' avec x' = f '(t), y' = g'(t) = a.cos t.

Vu que le vecteur TM dirige également (TM), on peut aussi écrire que le coefficient directeur de (TM) est tan ^(Ox,TM) car ^(Ox,TM) =  ^(Ox,MT) + ^(MT,TM) + π, ce qui laisse la tangente invariante.

Par suite, y'/x' = tan t = a.cost/x' et x' vérifie donc l'équation différentielle :

En posant u = tan(t/2), on a 2du = (1 + u2)dt et sin t = 2u/(1 + u2). On en déduit :

Or, pour t = π/2 , on a x = 0, d'où x = a.ln | tan(t/2) | + a.cost.

En définitive :   

x = a.ln | tan(t/2) | + a.cost , y = a.sint

L'étude de la courbe est relativement simple. On peut prolonger son étude à l'intervalle ]0,π[ en remarquant que le changement de t en - t laisse y inchangé mais change x en -x : (Γ) admet [Oy) comme axe de symétrie. Lorsque t tend vers π, (Γ) admet une branche infinie dont [Ox) est asymptote. A est un point de rebroussement.

 
x = 2.ln | tan(t/2) | + 2.cost , y = 2.sin t , 0 < t < π

 i  En termes de halage, vous remarquez, au vu de la représentation graphique du phénomène (et c'était bien prévisible), que le bateau à tendance à venir s'échouer sur la rive. Il faut donc quelqu'un à la barre... 

   Les tractrices sont les "droites" (géodésiques) du modèle tridimensionnel des géométries de Lobatchevski et de Beltrami : géométrie sur la pseudosphère que l'on obtient comme surface du volume de révolution engendrée par la tractrice autour de l'axe des abscisses.

Une équation peu sympathique ... :    

La présence  du logarithme dans l'expression de x n'est pas très sympathique... Recherchons une équation x f(u), y = g(u) plus homogène dans son écriture. En valeur absolue, tan(t/2) décrit R+ -{0}. Profitons-en pour poser tan(t/2) = e-u. On sait depuis la classe de 1ère que si l'on pose T = tan(t/2), on a : cos t = (1 - T2)/(1 + T2) et sin t = 2T/(1 + T2). On en déduit :

cos t = (1 - e-2u)/(1 + e-2u) = (eu - e-u)/(eu + e-u) = tanh u (tangente hyperbolique de u).

D'où x = a(tanh u - u). Quant à y = a.sin t, il devient y = 2a/(eu + e-u) = a/cosh u où encore y =a.sech u (sécante hyperbolique de u : sech u = 1/cosh u). L'équation de la tractrice devient ainsi :

x = a(tanh u - u) , y = a/cosh u   , u décrivant R


Que l'on aime ou non la trigonométrie hyperbolique, cette forme est beaucoup plus agréable, et tout particulièrement recommandée dans l'étude la développée de la tractrice... La tractrice étant une développante de chaînette.

Remarque :  

Si on trace la normale en T à la courbe, dire que la tangente en T est dirigée suivant le vecteur TM revient à énoncer que la courbe coupe orthogonalement tous les cercles centrés sur [Ox), de rayon OA. La tractrice est donc une trajectoire orthogonale de cette famille de cercles :


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