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Sophus
Lie étudia les sciences et les mathématiques à l'université de
Christiania (Oslo). Diplômé en 1865, Lie cherche sa
voie en poursuivant des études d'astronomie et de mécanique rationnelle tout en
donnant des cours particuliers. Ses lectures sur la géométrie nouvelle de
Poncelet et Plücker lui ouvrent la voie.
A Paris, il rencontre Klein, Darboux et Jordan qui deviendront ses amis. Arrêté à Fontainebleau (1870) où on le soupçonne d'être un espion prussien, Lie est finalement relaxé et rentre à Christiania (1871). Il prépare alors sa thèse, Sur une classe de transformations géométriques, soutenue en 1872, et obtient une chaire à Christiania, puis à Leipzig (1886) où il succède à son Klein nommé à Göttingen.
Outre des travaux novateurs dans la théorie de l'intégration des équations aux dérivées partielles et en géométrie projective, on retient surtout de Lie ceux portant sur les structures algébriques nouvelles, principalement initiées par Jacobi et qu'il applique à ses recherches (dès 1869) sur les équations différentielles en constatant l'invariance de ces équations par certaines transformations continues et dont son ami Klein se servira pour la classification des diverses géométries : c'est la naissance du concept de groupe de transformations. Lie publiera la synthèse de ses travaux dans son traite Théorie des groupes de transformations (1888).
En particulier, les notions de groupe et d'algèbre de Lie où interviennent des propriétés analytiques (car initialement mises en place pour la classification d'équations aux dérivées partielles) apparaissent chez Lie dès 1873 et annoncent la nouvelle branche importante des mathématiques que sera la topologie.
Ces structures trouvent aujourd'hui des applications en physique moderne : mécanique quantique et théorie de la relativité. Les travaux de Lie seront principalement poursuivis par Elie Cartan.
Klein et les groupes de transformations : » » Sylow
Groupe, anneau et corps topologiques, groupe de Lie, algèbre de Lie : |
Le concept de groupe de Lie n'est pas simple et dépasse largement le niveau de cette chronologie. Mais en schématisant à l'extrême, une telle structure possède non seulement celle d'un groupe algébrique usuel mais aussi des propriétés géométriques relevant plus précisément de la géométrie différentielle :
Groupe topologique, anneau et corps topologiques :
On appelle ainsi un groupe (G,*) muni d'une topologie (au sens d'Hausdorff : définie par les ouverts) pour laquelle les applications (x,y) → x*y et x → x-1 sont continues. On parle de topologie compatible avec la structure de groupe.
➔ Dans le cas additif, il s'agira de la continuité de l'addition (x,y) → x + y et du passage à l'opposé x → - x et dans le cas multiplicatif de la multiplication (x,y) → x × y (souvent noté implicitement xy) et du passage à l'inverse x → 1/x.
(R,+) et (R*, × ) sont des groupes topologiques. Leur topologie est la topologie induite par celle de R muni de sa topologie usuelle.
∗∗∗
Montrer que la continuité des deux applications (x,y)
→
x*y et x
→
x-1
équivaut à celle de (x,y)
→ x*y-1.
Dans le cas (R, +), il s'agira alors simplement de
l'application (x,y)
→ x
- y et dans le cas multiplicatif (R*,×) de l'application (x,y)
→ x/y.
On qualifie de même de topologique, un anneau ou un corps (A, +, ×) pour lequel (A, +) est un groupe topologique dont la multiplication est également continue ainsi que le passage à l'inverse dans le cas d'un corps.
♦ Groupe de Lie réel :
On nomme ainsi une variété différentielle réelle V de classe Ck (resp. selon les auteurs, de classe C∞) munie d'une structure de groupe dans lequel les applications (x,y) → x*y et x → x-1 (symétrique d'un élément x pour la loi *) sont de classe Ck (resp. de classe C∞).
➔ a) Cette définition sous-entend donc qu'un groupe de Lie est un groupe topologique.
∗∗∗
Montrer là encore que (x,y) → x*y et x → x-1
de classe Ck (ou C∞) peuvent être
remplacés par (x,y) → x*y-1 de classe Ck (ou C∞).
♦ Groupe de Lie complexe :
On nomme ainsi est une variété différentielle complexe V munie d'une structure de groupe dans lequel l'application (x,y) → x*y-1 est holomorphe sur C (donc de classe C∞, autrement dit analytique).
♦ Algèbre de Lie :
L'étude des groupes de Lie se trouve facilitée par l'introduction de la structure d'algèbre de Lie. On peut définir une telle algèbre de deux façons :
a1)
algèbre
usuelle A sur un corps commutatif K
dont la multiplication (seconde loi interne), généralement notée [,
]
(loi "crochet"), satisfait en outre aux
conditions 1 et 2 exprimées ci-après;
a2) espace vectoriel A sur un
corps commutatif K muni d'une
application bilinéaire [,
]
de A2 dans A telle que :
➔ On remarquera qu'une algèbre de Lie est anticommutative car [x + y,x + y] = 0 pour tous x et y, entraîne par distributivité selon a1 et biadditivité selon a2 : [x,x] + [x,y] + [y,x] + [y,y] = 0, donc [y,x] = -[x,y]. C'est dire que l'application bilinéaire de la définition a2 est alternée.
i La somme J(x,y,z) = [x,[y,z]] + [y,[z,x]] + [z,[x,y]] est appelé le jacobien de A.
Exemple : considérons l'anneau Mn des matrices carrées d'ordre n sur R ou C. C'est aussi une algèbre associative mais non commutative. Posons pour tout couple de matrices (A,B), [A,B] = A × B - B × A. On vérifiera facilement que muni de cette loi "crochet", Mn est une algèbre de Lie.
➔
D'une façon générale, toute algèbre associative
(A,
K, +, .
, ×
)
sur sur un corps commutatif K est une algèbre de
Lie lorsqu'on la munit de la loi "crochet" définie par [x,y] = x ×
y - y ×
x.
∗∗∗
Vérifier que (x,y) → [x,y] = x ×
y - y ×
x
est une fonction bilinéaire alternée de x
et y.
♦ Algèbre de Lie d'un groupe de Lie (ou associée à -) :
Notons e l'élément neutre d'un groupe de Lie G réel ou complexe qui, par définition, étant une variété différentielle, admet au point e un espace tangent Te. On peut munir Te d'une structure d'algèbre de Lie. La preuve de ce résultat n'est pas vraiment évidente et demande de longs développements préliminaires. Place est donc laissée aux spécialistes : en particulier à Frédéric Paulin (» réf.5b), univ. Paris-Saclay et à Jean-François Dat (» réf.6b), professeur à l'IMJ (Paris-Jussieu).
Exemple2 : R3 muni du produit vectoriel usuel (noté ∧) est une algèbre de Lie associée au groupe orthogonal O(R3), groupe de Lie des isométries vectorielles de l'espace. L'identité de Jacobi s'écrit alors : x∧(y∧z) + y∧(z∧x) + z∧(x∧y) = 0.
Algèbre de Maltsev : »
Ajoutons enfin que les groupes et algèbres de Lie apportèrent un outil fécond, tout particulièrement dans le cas non fini, dans le problème de la représentation linéaire de groupes topologiques : recherche d'un homomorphisme (continu) appliquant un groupe G sur le groupe GL(E) -ou un de ses sous-groupes- des transformations linéaires d'un espace vectoriel E.
➔ Pour en savoir plus :