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Brillant
polytechnicien, élève de
Fourier
et de Laplace,
astronome et physicien. Il occupa de nombreux et importants postes
d'enseignement : professeur à l'Ecole Polytechnique, professeur de mécanique à
la faculté des sciences de Paris, directeur de l'enseignement mathématique
des collèges de France. Élevé à la dignité de pair de France par
Louis-Philippe (1837), Poisson fut nommé doyen de la faculté des sciences
quelques mois avant sa mort.
On le connaît bien sûr pour sa célèbre loi de probabilités portant son nom (Recherches sur la probabilité des jugements en matière criminelle et en matière civile, 1837), mais ses travaux portent cependant principalement en électricité, magnétisme, mécanique céleste, mouvements vibratoires (théorie de la chaleur, théorie des ondes).
En introduisant de nombreux concepts mathématiques liés aux équations de Laplace (théorie du potentiel électrostatique, équations aux dérivées partielles), Poisson apparaît, à la suite de Daniel Bernoulli et Fourier comme le bâtisseur de la physique mathématique moderne : étude, au moyen de la seule analyse mathématique, du comportement d'un phénomène, en tant que conséquence des lois, attribuées par l'expérience, qui le régissent.
C'est à la demande de Poisson et de Fourier, dès 1834, qu'une chaire de Calcul des probabilités et de physique mathématique sera créée à la faculté des sciences de Paris (1850). Cette mise en place tardive s'explique par le manque de considération de ces branches nouvelles reposant, pour certains esprits, sur un manque de rigueur. » Kolmogorov
Membre éminent de l'Académie des Sciences, section de physique générale (élu en 1812), Poisson rejettera cependant et curieusement les travaux du jeune Galois en 1831.
La théorie du potentiel : |
Suite aux travaux de Laplace en électrostatique, c'est avec Poisson que la théorie mathématique du potentiel prend véritablement sa place dans son traité Sur la distribution de l'électricité à la surface des corps conducteurs, 1811.
Dans un champ de forces de composantes X, Y, Z (système de coordonnées dans R3) agissant dans un domaine D, le potentiel en un point de l'espace est donné par l'intégrale :
L'appellation potentiel de cette intégrale U apparaîtra ultérieurement chez Green en 1828. L'ensemble des points du champ d'égal potentiel est une surface qualifiée de surface équipotentielle.
En théorie du potentiel (électrostatique, gravitationnel), les équations de Poisson sont nombreuses. Dans le cas particulier d'un domaine sphérique D constitué de couches homogènes, en tout point extérieur à D, on peut démontrer que :
C'est dire que le potentiel vérifie l'équation de Laplace : son laplacien ΔU est nul. En tout point intérieur à D, ρ(x,y,z) désignant la densité, l'équation de Poisson s'écrit :
(» réf.3)
En physique mathématique, nombre de mathématiciens se confronteront désormais à ce type d'équations dites aux dérivées partielles, comme, plus proche de nous, Chazy et Poincaré avec le problème des n corps, Villani avec l'équation de Boltzman.
Un peu plus sur la notion de potentiel : » Notion d'équation aux dérives partielles : » » Dirichlet
La loi de Poisson : |
Ce n'est que très tardivement (trois ans avant sa mort) que Poisson se tourne vers le calcul des probabilités (Recherches sur la probabilité des jugements en matière criminelle et en matière civile, 1837) et énonce sa célèbre loi, limite d'une loi binomiale à espérance mathématique constante. Cette implication des mathématiques et du hasard dans la société fut à l'époque l'objet de houleux débats philosophiques.
Une variable aléatoire discrète X à valeurs entières suit une loi de Poisson de paramètre λ lorsque :
Cette loi intervient dans des processus aléatoires dont les éventualités sont faiblement probables et survenant indépendamment les unes des autres : cas des phénomènes accidentels, d'anomalies diverses, des problèmes d'encombrement ("files d'attente"), des ruptures de stocks, etc.
Étude de la loi de Poisson, tables : » Loi binomiale & loi de Poisson : »
∗∗∗
Files d'attente , Accidents
du travail , En raison
d'encombrement...
La loi des grands nombres selon Poisson : |
Dans son traité de 1837 Sur la probabilité des jugements, Poisson exhibe (page 137 et suivantes) une variante de la loi des grands nombres de Jakob Bernoulli. C'est d'ailleurs lui qui qualifia ainsi le célèbre résultat du génial mathématicien suisse (page 7 du traité de 1837) :
Soit Xn une suite de variables aléatoires indépendantes à valeurs dans {0,1} de lois de probabilités Prob{Xn = 1} = πn et donc Prob{Xn = 0} = 1 - πn. Dans le cas de variables de Bernoulli, πn ne dépend pas de n : il existe p, 0 < p < 1, tel que πn = p pour tout n. Soit alors pn la moyenne arithmétique de 1 à n des πk :
pn = (π1 + π2 + ... +πn)/n
Dans ces conditions, Poisson montra que la loi faible des grands nombres de Bernoulli se prolonge à :
Comme le précise Paul Deheuvels (université Paris VI, spécialiste en statistique et calcul des probabilités, » réf.5,), contrairement à ce que l'on pourrait s'attendre, les distributions de probabilité distinctes n'affectent en rien la validité de la loi des grands nombres. Tout au contraire, Wassily Hoeffding, statisticien américain (1914-1991) prouva en 1956 ce résultat selon lequel :
Pour ε = 1/n et pn = (π1 + π2 + ... +πn)/n fixé, les événements {ΣXi /n - pn ≥ 1/n} et {ΣXi/n - pn ≤ - 1/n}
ont une probabilité maximale lorsque les πi sont égaux.
Par suite, pour ces valeurs, l'événement contraire {| ΣXi/n - pn | ≤ 1/n} a une probabilité minimale !
Cette loi des grands selon Poisson appliquée aux estimations des erreurs d'observation fut mise à mal par Bienaymé qui en conteste le bien-fondé dans ce cas particulier (» réf.2).
Lois fortes des grands nombres : »
➔ Pour en savoir plus :
Cours de mathématiques,
Tome 2,
par Jean Bass,
Éd. Masson et Cie - Paris, 1964.
Problèmes d'enseignement. Applications pratiques des lois
de probabilité
Cours d'analyse et de mathématiques sociales de l'EHESS
sur le site Numdam :
http://archive.numdam.org/article/MSH_1969__25__35_0.pdf