ChronoMath, une chronologie des MATHÉMATIQUES
à l'usage des professeurs de mathématiques, des étudiants et des élèves des lycées & collèges

ARTIN Emil, allemand, 1898-1962

 !  Ne pas confondre Emil Artin avec son fils Michael Artin (1934-) également éminent mathématicien.
Source portrait : Institut de recherche mathématique dOberwolfach (MFO)

Né à Vienne (Autriche), Emil Artin étudie tout d'abord dans sa ville natale. Après ses études supérieures de mathématiques et sa thèse à l'université de Leipzig (1921) portant sur les corps quadratiques dont Otto Ludwig Hölder fut un des examinateurs, Artin se rend ensuite à Göttingen où il rencontre Hilbert et Hasse. L'année suivante (1923), un poste de professeur lui est proposé à l'université de Hambourg.

En 1925 (1926?), Artin prend la nationalité allemande. Hélas, l'arrivée au pouvoir d'Adolph Hitler en 1933 le conduira à fuir l'Allemagne nazie car son épouse, une de ses étudiantes épousée en 1929, était de confession juive. Artin émigre pour l'Amérique avec sa famille en 1937 et s'installe à Princeton dont l'université avait institué un accueil à l'intention des scientifiques dès les premières persécutions de Hitler, notamment à l'encontre des juifs.

Emil Artin enseigna à l'université de Princeton pour ne revenir qu'en 1958 à Hambourg. Il est l'auteur d'importants travaux sur les structures algébriques, l'algèbre commutative, la théorie des nombres algébrique,  la théorie des nœuds et des tresses.

Artin montra que la recherche en théorie des nombres se transpose à l'étude des corps de fonctions algébriques sur un corps fini. On lui doit la notion de groupe résoluble, liée aux sous-groupes distingués (dont l'étude fut initiée par Jordan) et à la résolution des équations par radicaux de Galois (d'où le terme de résoluble).

Groupes simples et groupes de Mathieu : »

En 1927, dans un article publié par l'université de Hambourg, Beweis des allgemeinen Reziprozitätsgesetzes (Preuve de la loi générale de réciprocité, » réf.7), Artin complète la résolution partielle du 9è problème de Hilbert présentée en 1921 par un étudiant japonais Teiji Takagi (1875-1960), élève de Hilbert à l'université de  Göttingen. Sa preuve, très complexe, dépasse par sa généralité la requête de Hilbert, à savoir :

On demande de démontrer, dans le cas d'un corps de nombres quelconque, la loi de réciprocité des résidus
de puissances de degré n,
n désignant un nombre premier impair, une puissance de 2
ou
une puissance d'un nombre premier impair.

Quelques mois plus tard, Emil Artin résolvait également, par l'affirmative, le 17è problème de Hilbert :

Une fonction rationnelle positive sur Rn peut-elle s'écrire comme somme de carrés de fonctions rationnelles ?

Le résultat s'applique à des fonctions polynomiales positives, la décomposition s'exprimant alors généralement au moyen de fonctions rationnelles (quotients P/Q de deux polynômes). Dans un conférence relative à ce problème (» réf.8c), Olivier Benoist, normalien, chargé de recherches au CNRS, présente un exemple polynomial d'Olga Taussky (mathématicienne américaine d'origine tchèque, 1906-1995 » réf.8a) ne pouvant s'écrire comme somme de carrés polynomiaux mais admettant cependant une décomposition au moyen de fonctions rationnelles :

Loi de réciprocité quadratique (n = 2) : »

Groupe quotient, groupe résoluble :

Soit H un sous-groupe distingué d'un groupe (G,*). L'ensemble des classes d'équivalence pour la relation

a ~ b ⇔ a-1 * b∈H  (⇔ b ∈aH) ,

muni de la loi (encore notée *) définie par a' * b' = (a * b)' , a' et b' désignant les classes de a et b, est un groupe : groupe quotient de G par H noté G/H.

Groupe résoluble :           

Un groupe G d'élément neutre e est dit résoluble s'il existe une suite emboîtée {e}⊂ H1 H2 ..., Hp = G de sous-groupes de G telle que :

Le groupe symétrique (S3, o) (non commutatif) est résoluble : si l'on pose S3 = {σ1, σ2, ..., σ6}, avec :

On peut former sa table de Pythagore (à droite) et on a : {σ1} {σ1, σ2, σ3} S3

{σ1} est bien évidemment distingué dans S3. Il est facile de vérifier que H = {σ1, σ2, σ3} est un sous-groupe distingué de S3 : pour tout σi de S3, les produits σi*σ2*σi-1  et σi*σ2*σi-1 sont éléments de H. Le groupe quotient S3/H ne contient que deux éléments (classes) : la classe de σ1 , soit '1 = {σ1, σ2, σ3} et σ'4 = {σ4, σ5, σ6} et (S3/H, o) est clairement commutatif.

    S4 est également résoluble mais on démontre que si n ≥ 5, alors Sn n'est pas résoluble, c'est ainsi que Galois prouva que les équations algébriques de degré supérieur à 4 ne sont pas résolubles par radicaux.

Anneau artinien :

On nomme ainsi un anneau unitaire dans lequel toute suite décroissante (au sens de l'inclusion) d'idéaux de A est stationnaire. Un anneau artinien est noethérien, du nom de la mathématicienne allemande Emmy Noether : tout idéal à droite (ou à gauche) admet une partie génératrice finie.

Théorème d'Artin-Chevalley :

 Tout polynôme de n variables, nul en 0 et de degré inférieur à n sur un corps fini K,
admet au moins une racine non nulle dans K.

Théorie des corps de classes :

On doit également à Emil Artin le développement de la théorie des corps de classes, initiée par Hilbert en 1898 suite aux travaux de Kronecker sur les corps de nombres algébriques, s'interprétant comme la classification des extensions galoisiennes abéliennes de ces derniers portant ainsi sur l'étude des propriétés arithmétiques des idéaux d'un corps K lorsqu'on les plonge dans un surcorps de K. Également étudié par Chevalley, c'est encore aujourd'hui un important sujet d'études qui fut généralisé récemment par Langlands (» réf. 3 à 5). Autres liens sur la page consacrée à Galois.

» Galois , Hensel , Tate , Serre


    Pour en savoir  plus :

  1. Hommage à Emil Artin par Claude Chevalley (1964) sur le site Numdam :
    http://archive.numdam.org/article/BSMF_1964__92__1_0.pdf

  2. Groupes finis par Fabrice Castel (univ. de Rennes 1) :
    http://agreg-maths.univ-rennes1.fr/documentation/docs/Groupes_finis.pdf

  3. Introduction à la théorie du corps de classes (Rodolphe Lampe, univ. Rennes) :
    https://perso.univ-rennes1.fr/matthieu.romagny/etudiants/Lampe.pdf

  4. Théorie du corps de classes local (Tristan Vaccon, univ. Rennes) :
    https://perso.univ-rennes1.fr/tristan.vaccon/rapport2011.pdf

  5. Résultats sur la théorie des corps de classes (Geneviève Cazes) :
    http://archive.numdam.org/article/SDPP_1968-1969__10_2_A8_0.pdf

  6. Groupe des tresses d'Artin : http://www.math.u-psud.fr/~riou/doc/tresses.pdf
  7. a) 9è problème de Hilbert : Beweis des allgemeinen Reziprozitätsgesetzes : surSpringer Link (39,95 €) : https://link.springer.com/article/10.1007/BF02952531
    b) 17è problème de Hilbert : Über die Zerlegung Definiter Funktionen in Quadrate, sur site Springer Link (39,95 €) : https://link.springer.com/article/10.1007/BF02952513
  8. a) In memoriam Olga Taussky-Todd : https://www.ams.org/notices/199608/taussky.pdf
    b) Sum of squares par Olga Taussky (California Institute of Technology) :
    https://maa.org/sites/default/files/pdf/upload_library/22/Ford/OlgaTaussky.pdf
    c) David Hilbert et son 17è problème : la tête aux carrés, une vidéo de la SMF (2020) :
    https://smf.emath.fr/smf-dossiers-et-ressources/benoist-olivier-david-hilbert-et-son-17e-probleme-la-tete-aux-carres
    ou bien YouTube : https://www.youtube.com/watch?v=NBkIcK73ObE

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