ChronoMath, une chronologie des MATHÉMATIQUES
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THOM René Frédéric, français, 1923-2002        Médaille Fields 1958

Après des études à l'Ecole normale supérieure de Paris (1943-46), René Thom décroche l'agrégation et poursuit ses études de doctorat à l'université de Strasbourg, tout en y enseignant en tant qu'assistant ("professeur sans chaire").

» L'université de Grenoble date du 14è siècle. Elle ne possédait pas de section scientifique proprement dite. Ce sera Joseph Fourier qui la mettra en place en 1811 alors qu'il était préfet de l'Isère sous le règne de Napoléon. En 1971, la faculté des sciences est baptisée Grenoble 1. Elle prendra le nom du célèbre mathématicien et physicien en 1987.

C'est à Paris (1951) que René Thom présente sa thèse de doctorat portant sur les variétés complexes dirigée par Henri Cartan, intitulée Espaces fibrés en sphères et carrés de Steenrod (» réf.4) et annonce, dans le cadre de la topologie différentielle (topologie des variétés différentielles, également initiée outre-Atlantique par Veblen), la théorie du cobordisme, un concept totalement nouveau dans son mémoire de 1954 : Quelques propriétés globales des variétés différentiables (» réf.5), facilitant la recherche d'un difféomorphisme éventuel (homéomorphisme différentiable) entre deux variétés et la classification de ces dernières. Une œuvre maitresse qui lui vaudra une des deux médailles Fields 1958.

Les Médailles Fields : »               La notion d'espace fibré : »

Thom enseigna dans diverses universités comme Caen et Grenoble mais principalement à Strasbourg de 1954 à 1963. Cette même année, il obtient un poste définitif (professeur permanent) à l'IHÉS, Institut des Hautes Études Scientifiques, où il enseigna dès sa fondation en 1958 à Bures-sur-Yvette, près d'Orsay.

» IHÉS           » Poincaré , Malgrange , Cerf , Smale

René Thom est surtout connu du "grand public" en tant qu'auteur de Paraboles et Catastrophes (1980, Milan - 1983, Paris) basée sur sa théorie des catastrophes (1969), relative à l'étude de certaines classes d'équations différentielles admettant des singularités et permettant d'étudier certains phénomènes naturels variant de façon soudaine (» réf.6). Ces travaux s'inscrivent dans la théorie des singularités qui sera développée par l'américain Hassler Whitney.

Théorie des catastrophes, une belle page pédagogique d'Étienne Ghys (ENS Lyon) : »

 i  Article du journal Le Monde (31 octobre 2002) :

René Thom est décédé le 25 octobre 2002. Fondateur de la topologie différentielle qu'il a ancrée du côté géométrique par sa théorie du cobordisme, très tôt préoccupé de l'impact de modèles mathématiques dans plusieurs domaines du savoir (linguistique, biologie et philosophie), son point de vue sur la théorie des singularités a révolutionné la conception que l'on avait de la genèse des formes et de la dynamique de leur évolution. Membre de plusieurs académies étrangères (Brésil, Leopoldina en Allemagne, Pologne), docteur honoris causa des universités de Warwick, Tubingen, Nimègue et San Sebastian, Grand Prix scientifique de la Ville de Paris en 1974, il a reçu la médaille Fields en 1958.

La théorie du chaos et l'effet papillon :  

Une autre théorie, toute aussi catastrophique..., est celle du chaos (du grec khaos au sens étymologique d'immensité désordonnée et, par là, de désordre non maîtrisable) : la théorie du chaos est due à Edward Lorenz (1917-2008) au tout début des années 1960. Cet éminent météorologue américain au MIT (Massachusetts Institute of technology), de formation initiale en mathématiques (» réf. 8a) , montra que des changements quantitatifs minimes sur les paramètres  des équations (conditions initiales) régissant les prévisions météorologiques pouvaient conduire à des comportements totalement différents et insoupçonnés, "chaotiques", sur les solutions. Des aberrations peuvent aussi provenir d'arrondis ou de troncatures sur les données liés aux capacités et aux méthodes de calcul utilisé (ordinateurs, algorithmes).

C'est ce qu'il nomma une dizaine d'années plus tard (1972) l'effet papillon : Does the flap of a butterfly's wings in Brazil set off a tornado in Texas ? Un succès tant scientifique que médiatique ! Ses conclusions révolutionnaires sur la prévisibilité de phénomènes naturels ont profondément bouleversé la recherche scientifique : sciences de la Terre, astronomie, biologie, anthropologie, sciences humaines. On entre là dans une branche mathématique récente directement empruntée aux sciences physiques : la théorie des systèmes dynamiques.

    On pourra se référer à la Théorie du chaos de James Gleick (» réf. 6a) ainsi qu'à Hasard et chaos de David Ruelle (» réf. 6b) et consulter une page pédagogique d'Etienne Ghys (CNRS/ENS) sur le sujet (» réf. 7).

Notion de système dynamique : »


L'Institut des Hautes Études Scientifiques (IHÉS) :    

L'IHÉS, sis à Bures-sur-Yvette, proche de la Faculté des sciences d'Orsay, fut fondé en 1958 sur des fonds privés par la volonté de l'industriel, savant et mécène russe Léon Motchane (qui soutint une thèse de mathématiques à l'âge de 50 ans !) assisté de Jean Dieudonné, Alexander Grothendieck et du physicien américain Robert Oppenheimer ("père" de la bombe atomique, spécialiste en physique quantique, 1904-1967, biographie sur Wikipédia), alors directeur du célèbre Institute for Advanced Study (Institut d’étude avancée) de Princeton. Motchane dirigea l'Institut jusqu'en 1962 laissant la place à Nicolaas Kuiper.

Aujourd'hui, l'institut est toujours privé, mais cependant financé à hauteur de 60% par l'État (ministère de l'Éducation & de la Recherche). Il est constitué de 40 membres dont 5 permanents. Les 35 autres, dits "visiteurs", résident sur invitation jusqu'à un an au sein de l'institut (» réf.10).

      


  Découvrir l'IHÉS en vidéo (YouTube)

Centenaire de René Thom à l'IHÉS, 1923-2023 : »


    Pour en savoir plus :

  1. Paraboles et Catastrophes par René Thom - Ed. Flammarion, Paris, 1983

  2. Publications de René Thom numérisées sur le site Numdam,  dont Problèmes rencontrés dans mon parcours mathématique :
    http://www.numdam.org/search/Thom René-a

  3. Travaux de René Thom sur les singularités d'applications différentiables par Bernard Teissier.

  4. La thèse de René Thom, sur le site Numdam : http://archive.numdam.org/article/ASENS_1952_3_69__109_0.pdf

  5. Quelques propriétés globales des variétés différentiables, par René Thom (1954) sur le site de l'université d'Edimbourg : http://www.maths.ed.ac.uk/~aar/papers/thomcob.pdf

  6. a) Théorie du chaos, vers une nouvelle science par James Gleick (Éd. Albin-Michel, 1987)
    b) Hasard et chaos, Éd. Odile Jacob, 2010 par David Ruelle (physicien, spécialiste des systèmes dynamiques, professeur honoraire IHES);
    David Ruelle est également auteur de L'étrange beauté des mathématiques (2008, même éditeur).

  7. L'effet papillon par Etienne Ghys : http://ghys.perso.math.cnrs.fr/exposes/Papillon-ENS.pdf

  8. a) Notice biographique d'Edward Lorenz (journal Le Monde) :
    https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2008/04/22/edward-lorenz_1036964_3382.html
    b) Edward Lorenz, father of chaos theory and butterfly effect :
    http://web.mit.edu/newsoffice/2008/obit-lorenz-0416.html

  9. Second degré et chaos, diagramme et constantes de Feigenbaum :
    http://freenrg.info/Astro/Texts/Misc_Divers/Feigenbaum.PDF

  10. Les premières années de l'IHES : https://www.ihes.fr/les-premieres-annees-de-lihes/


Yvonne Choquet-Bruhat  Dixmier
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