ChronoMath, une chronologie des MATHÉMATIQUES
à l'usage des professeurs de mathématiques, des étudiants et des élèves des lycées & collèges

ROBINSON Abraham, américain, 1918-1974

 !  Sans lien de parenté avec le britannique Derek Robinson (1938-, théorie des groupes,  algèbre homologique), ni avec Raphael Robinson (1911-1995, logique, axiomatique) ou Julia robinson son épouse, née Bowman.

Allemand d'origine Abraham Robinson naquit à Waldenburg en Pologne (aujourd'hui Walbrzich), ville de Silésie alors sous domination prussienne. De religion juive, Robinson dut fuir l'Allemagne nazie dès 1933.

Après des études en Angleterre, il s'installe à Jérusalem (alors capitale de la Palestine sous mandat anglais). Il sera à l'université de Jérusalem, l'élève de Fraenkel. A l'issue de son master (1946), Robinson poursuit ses études de doctorat à Londres où il soutient sa thèse Métamathématique des systèmes algébriques en 1949. Après divers postes aux États-Unis et un retour à Jérusalem (1957-60), Robinson terminera sa carrière à l'université de Yale (sise à New Haven, USA) de 1967 à 1973.

La période troublée de la seconde guerre mondiale fut également une époque difficile pour les mathématiques bousculées par ce qu'on appela la crise des fondements. Dans le prolongement de sa thèse, Robinson travailla sur ce que Hilbert appela la métamathématique ou théorie de la démonstration et, avec son compatriote Tarski, sur la théorie des modèles dans le cadre de la cohérence des théories axiomatiques, algèbre en particulier (théorie des corps).

Tarski et la théorie des modèles : »

Robinson fut aussi chercheur en physique théorique et il put constater que depuis Dedekind et Weierstrass les nombres du physicien et du mathématicien, avec la construction des nombres réels, ont pris des chemins divergents. : Il développe alors ce qu'il appela l'analyse non standard (NSA, Non Standard Analysis, 1961-1966) :

L'analyse non standard, ou NSA :

Robinson construit un modèle du corps des nombres réels plus proche du concept infinitésimal de Leibniz ou de Guillaume de l'Hospital où la notion de limite est éludée et l'infini ramené au seul infini potentiel, contrairement à l'infini actuel, consistant à considérer globalement une collection infinie d'objets).

Plutôt que d'utiliser les ε, quitte à les couper en morceaux à la manière de Weierstrass, Robinson reprend, comme le firent  Euler et Cauchy, une approche simplifiée des infiniment petit et grand.

L'ensemble R des nombres réels "standards" est complété par les nombres hyperréels : infiniment petits (dits infinitésimaux) ou infiniment grands. Tout nombre distinct de ceux-ci sont dits standards.

On obtient une structure de corps commutatif, généralement noté *R, contenant R dans lequel l'axiome d'Archimède n'est plus valide. Quelques règles de calcul dans *R :

  1. x est dit infinitésimal si | x | est strictement inférieur à tout standard positif;
  2. x est dit fini si 1/x est non infinitésimal;
  3. x est dit infiniment grand si 1/x est infinitésimal;
  4. x et y sont dits infiniment proches si x - y est infinitésimal.
  5. la somme et le produit de deux infinitésimaux est infinitésimale.
  6. si x est infinitésimal et y standard, leur produit xy est infinitésimal et x ± y est fini.

•  Montrons la continuité de la fonction f(x) = x2 en tout point a réel standard. Soit i un infinitésimal (pouvant être positif ou négatif). On a :  f(a + i) - f(a) = 2ai + i2. Selon la propriété 6, f(a + i) - f(a) est infinitésimal, ce qui est équivalent à la continuité au sens de Weierstrass :

∀ε > 0, ∃h > 0 / |x - a | < h  ⇒  | f(x) - f(a) | < ε

Par cette construction, Robinson espérait aussi remédier à certaines incohérences des mathématiques traditionnelles découvertes lors de la construction de la théorie des ensembles reposant sur la simple logique booléenne du tiers exclu, non toujours applicable aux ensembles infinis non dénombrables.

En prouvant l'indécidabilité de l'hypothèse du continu, Cohen ouvrait la porte d'une construction des nombres réels distincte de celle de Weierstrass, Dedekind ou Cauchy.

L'analyse non standard procède d'une mathématique constructive. Pour les besoins de l'analyse non standard, il fallait réviser les bases de la théorie des ensembles, initiée par Cantor, dont la dernière mouture était celle de Zermelo et Fraenkel. Ce sera en particulier le fait de l'américain Joseph E. Nelson avec son Internal Set Theory (1977).

 i  Joseph Edward Nelson (1932-2014) : Diplômé de l'université de Chicago (1955). Professeur à l'université de  Princeton. Outre la refonte de la théorie des ensembles dans le cadre de l'analyse non standard de Robinson, ses travaux portèrent sur les processus stochastiques (» Markov) et sur les équations différentielles stochastiques.

Apéry et l'irrationalité de ζ(3) : »

     Pour en savoir plus  :

  1. LES NOMBRES, leur histoire, leur place..., Ch. 12, par une équipe de mathématiciens allemands
    Ed. Springer Verlag (Heidelberg - 1992), Edition française Vuibert - 1998

  2. Dictionnaire des mathematiques, tome 2 : fondements, probabilites, applications
    ENCYCLOPÆDIA UNIVERSALIS, Éd. Albin Michel, Paris, 1997/98.
  3. Mathématique constructive, p. 58 et suivantes, par Roger Apéry dans : Penser les mathématiques, Éd. du Seuil, Paris, 1982.

  4. Analyse non standard, nouvelles méthodes infinitésimales en analyse. Applications à la géométrie et aux probabilités, par Pierre Cartier
    http://www.numdam.org/item/RCP25_1985__35__1_0.pdf

  5. Qu'est-ce que l'analyse non standard ? Repères n°11 - avril 1993, par Thérèse Gilbert, Éd. G.E.M. de Louvain-La-Neuve

  6. Introduction to non-standard analysis, par Diego Rayo (univ. Chicago) :
    http://math.uchicago.edu/~may/REU2015/REUPapers/Rayo.pdf


Feynman   Robinson Julia (sans parenté)
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