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Mathématicien
et philosophe
d'origine autrichienne, le plus
grand logicien depuis Aristote, selon Von Neumann. Après avoir débuté des
études de physique à Vienne, il se passionne pour la théorie des nombres en
suivant les cours de Phillip Fürtwängler (1869-1940) -de la même famille que le célèbre
chef d'orchestre Wilhelm Fürtwängler- et poursuit
dès lors (1926) des études de mathématiques tout en s'intéressant à la
philosophie.
Sa thèse sur la complétude du calcul logique (über die Vollständigkeit des Logikkalcüls, 1929) est supervisée par Hahn à l'université de Vienne. Professeur en cette même université, c'est à 25 ans que Gödel énonça son célèbre théorème d'incomplétude.
L'arrivée d'Hitler au pouvoir en 1933 va perturber la carrière du jeune mathématicien. Il n'est pas juif, mais les nazis lui reprochent ses relations avec certains scientifiques juifs de Vienne. Mais la réputation de Gödel a traversé l'Atlantique, Veblen, chargé du tout nouvel Institute for Advanced Study, l'invite à Princeton et deviendra un ami fidèle. Il y rencontrera Church et von Neumann.
Malgré sa santé fragile, anorexique
et sujet à de
graves dépressions, ses brillants travaux n'en seront pas affectés. Gödel
reviendra aux Etats-Unis en 1935 et 1938, et quittera définitivement l'Autriche en
février 1940 en s'établissant à Princeton, avec sa femme Adèle Nimburski, une
danseuse d'un night-club de Vienne qu'il côtoyait depuis 10 ans et qu'il épousa
en 1938 (»
réf.17).
Gödel poursuivit ses recherches au sein du célèbre Institute for Advanced Study où il côtoie Albert Einstein. à l'exception de réflexions philosophiques portant en particulier sur la nature de l'espace-temps où il envisage la possibilité de revisiter le passé, Gödel consacra sa carrière à la logique dans le cadre du fondement des mathématiques et formula des théorèmes fondamentaux portant sur les relations indécidables et la consistance des théories mathématiques.
Consistance (cohérence) et indécidabilité : |
Au sein d'une théorie, Gödel qualifie d'indécidable une relation dont on ne peut dire, au moyen des axiomes de la théorie, qu'elle est vraie ou fausse. Une théorie est dite contradictoire ou, suivant l'époque et les mathématiciens, non consistante ou non cohérente, si le système d'axiomes qui la définit aboutit à une contradiction, c'est à dire à l'existence d'un théorème qui serait, dans la théorie elle-même, à la fois vrai et faux. Le qualificatif satisfaisable (au sens de "qui peut être satisfait") est parfois employé comme synonyme de consistant, mais son usage prend mieux son sens dans le cadre de la théorie des modèles et de la complexité algorithmique.
» Tarski , Skolem , Henkin , Maltsev Aristote et logique aristotélicienne : »
Théorème de complétude (thèse de 1929) : |
On dit qu'une théorie axiomatique T est
complète si toute assertion A énoncée
dans T peut être prouvée (déduite) au seul moyen des axiomes de T. On obtient alors un
nouveau théorème de T. La géométrie euclidienne est complète (Tarski,
1951). De même celle de Lobatchevski, dite
hyperbolique.
Soit T est une théorie axiomatique sur un langage du premier
ordre et A une assertion satisfaisable dans tout modèle de T,
alors A est
démontrable dans T (peut être déduite des axiomes de T).
Théorie des langages, fonctions calculables, fonctions récursives : |
En 1930, dans le cadre de la théorie de la démonstration (programme de Hilbert, 1928), Gödel, dans son traité Die Vollständigkeit der Axiome des logischen Funktionenkalküls (L'intégralité des axiomes de la logique du calcul des fonctions) redéfinit le langage mathématique de l'arithmétique de Peano en formalisant le concept de fonctions récursives initié par Skolem en 1923.
Une fonction calculable d'une ou plusieurs variables entières est décrite par un algorithme permettant de l'évaluer en un nombre fini d'étapes au moyen de certaines opérations fondamentales. La notion actuelle de fonction récursive rencontrée en programmation, faisant appel à elle-même dans sa définition, comme ici celle du PGCD, est née de ces nouveaux concepts (» réf. 2 à 5 & 12).
En savoir un peu plus sur les fonctions récursives : »
» Ackermann , Turing , Church , Kleene , Rózsa Péter , Kalmár , Cook
Une théorie mathématique constitue une théorie formalisée (on parle aussi dans ce contexte d'un système formel) lorsque celle-ci est explicitée à partir d'un nombre fini (ou au plus dénombrable) de paramètres et conditions d'écriture (syntaxe) qui définissent son langage :
•variables et constantes •axiomes •relations (=, <, ...)
•connecteurs logiques (ET, OU, négation, implication, ...)
•quantificateurs, opérations ensemblistes (∃, ∀, ⊂, ...)
L'usage complémentaire d'un certain nombre de symboles conduit à un langage propre à la théorie en question. A partir de ces objets de base, on construit des expressions qui, par composition (raisonnement), en induisent de nouvelles.
➔ En logique mathématique, on parle parfois de langage formel ou de langage symbolique pour exprimer l'idée d'un langage basé sur une logique pouvant conduire à des raisonnements déductifs abstraction faite de toute application à des cas particuliers ou concrets
La notion mathématique de modèle d'une théorie : »
Par un processus complexe Gödel ramène les symboles, fonctions, formules et énoncés (finis) à un entier premier, puissance ou produit de puissances de nombres premiers (les nombres de Gödel). L'unicité de la décomposition en produit de facteurs premiers permet une association sans ambiguïté.
Théorème d'incomplétude : |
En 1931, dans un article intitulé Sur les propositions formellement indécidables des Principia Mathematica et des systèmes (logiques) apparentés (Über formal unentscheidbare Sätze der Principia mathematica und verwandter Systeme), Gödel construit un système logique formel basé sur les Principia Mathematica de Russel. Au moyen des nouveaux outils théoriques évoqués ci-dessus et permettant de définir toute opération arithmétique, fonction ou assertion, le jeune Kurt Gödel (âgé de 26 ans) prouva ce résultat bouleversant, tant sur le plan mathématique que philosophique, à savoir que :
Toute théorie formelle T (fondée sur une axiomatique)
consistante et susceptible de formaliser
en son sein l'arithmétique (théorie
axiomatique des nombres), est incomplète.
C'est dire qu'il existe au moins une proposition de l'arithmétique indémontrable dans T : elle est indécidable, on ne pourra prouver ni qu'elle est vraie ni qu'elle est fausse ((» réf. 6 à 9 & 12).
Gödel qui hésitait dans sa jeunesse entre formalisme et intuitionnisme, répond ainsi par la négative au deuxième problème de Hilbert. Ce résultat ruine également les espérances de ce dernier quant au formalisme, panacée supposée (programme de Hilbert, 1928) face aux contradictions et incertitudes rencontrées depuis la création de la théorie des ensembles de Cantor. Il montre les limites du raisonnement logique et l'impossibilité de construire l'arithmétique sur le seul support logique comme le voulaient les partisans du logicisme que furent Frege et Russell.
Hilbert et la métamathématique : » » Kalmár , Rózsa Péter
Autre découverte fondamentale de Gödel (Princeton, 1937-38) : |
Après les résultats fondamentaux sur les fonctions calculables (1926-1936) aboutissant à son théorème d'incomplétude, Gödel se penche sur le très difficile problème posé par Cantor : l'hypothèse du continu, à savoir s'il existe ou non un ensemble dont le cardinal soit compris entre Card N et Card R. Dans une série d'articles intitulée The consistency of the axiom of choice and of the generalized continuum hypothesis with the axioms of set theory, Gödel concluait en 1938 :
Si la théorie des ensembles est consistante, on peut lui
ajouter l'hypothèse
du continu
et/ou l'axiome
du choix, elle restera non
contradictoire.
Mais Gödel, accaparé par d'autres sujets, dont la théorie de la relativité d'Einstein, n'ira pas plus loin sur ce sujet. Ce sera Cohen qui apportera la réponse en 1963 : l'hypothèse du continu est indécidable.
Prix Gödel : |
Ce prix récompense des travaux en informatique théorique (théorie des langages, algorithmique, théorie des jeux, cryptographie, ... ). Créé en 1992 par l'Association européenne pour l'informatique théorique (EATCS : European Association for Theoretical computer Science) et l'ACM (Association for Computing Machinery, États-Unis), ce prix annuel récompense des articles innovants en informatique théorique. Son montant est de 5000$ US. On trouvera sur le site de l'ATCS la liste des lauréats depuis 1993 et les sujets abordés. L'ACM est également à l'origine du prix Turing.
➔ Pour en savoir plus :