![]() ![]() i polygone, du grec poly = plusieurs et gônia = angle. |
Un polygone convexe est dit régulier si ses côtés ont même mesure et si ses sommets sont situés sur un même cercle (on parle de sommets cocycliques : polygone inscriptible). L'étude des polygones réguliers convexes est née de la volonté des mathématiciens grecs de l'Antiquité d'améliorer la précision du calcul de la circonférence sur lesquels se pencheront tout particulièrement Archimède avec sa méthode des périmètres, puis, bien plus tard au 15è siècle, Nicolas de Cuse avec la méthode, plus subtile, des isopérimètres dans le calcul du célèbre nombre π, rapport de la circonférence à son diamètre.
L'hexagone (6 côtés) et le décagone (10 côtés) réguliers
Euclide définissait
un polygone régulier en tant que polygones équilatéraux (côtés
de même mesure) et
équiangles (angles
de même mesure).
Montrons que la
cocyclicité des sommets d'un polygone régulier revient à dire que
ses angles ont même mesure :
Propriété 1 :
Sous l'hypothèse de l'égalité des mesures des côtés, la
condition de cocyclicité des sommets
équivaut à l'égalité des mesures de ses angles, comme
^ABC, ^BCD,
^CDE, ...
Preuve : Si les sommets sont cocycliques sur un cercle de centre O, les côtés ayant même mesure, les arcs sous-tendus ont même mesure; donc, tous les angles au centre, comme ^AOB, ^BOC, ... ont même mesure. Or tous les triangles comme AOB, BOC, ... sont isocèles; ils sont donc isométriques, ce qui implique l'égalité des angles du polygone. Inversement : si les côtés et les angles du polygone ont même mesure, notons respectivement d et α ces mesures et considérons quatre sommets, comme A, B, C, et D ci-dessous. Trois points non alignés sont cocycliques; Les points A, B, C sont situés sur le cercle (ABC) de centre O, de rayon OA = OB = OC. Le polygone étant convexe, D appartient au demi-plan 1 de bord (BC) contenant A, à distance d de C, donc sur le cercle de centre C de rayon d, de sorte que ^BCD = α. Ce ne peut être D'. C'est donc D sur (ABC). De proche en proche, on montrerait que tous les sommets du polygone sont situés sur ce cercle : les sommets sont cocycliques.
Somme des angles intérieurs :
Si l'on considère un polygone convexe à n côtés, régulier ou non, depuis un sommet A on peut tracer n - 3 diagonales, lesquelles font apparaître (n - 3) - 1 triangles, auxquels on en rajoute 2 formés avec les deux côtés d'extrémité S. La somme des angles est donc :
(n - 2) × 180° ou, exprimée en radians, (n - 2) × π (s)
Apothème, périmètre et aire d'un polygone régulier :
Ci-dessous, la mesure du segment OH, abaissé du centre du cercle circonscrit aux côtés d'un polygone régulier est appelé apothème (du grec ancien apotithêmi = j'abaisse).
On note r le rayon du cercle circonscrit (on peut parler du rayon du polygone régulier) et α la mesure d'un angle intérieur :
1/ Selon (s) ci-dessus, la mesure d'un angle intérieur est α = 180 - 360/n degrés (en radians : α = π - 2π/n);
2/ L'angle au centre interceptant un côté d'un polygone régulier à n côtés mesure
360/n degrés
(2π/n radians);
i On retrouve
cette mesure comme étant celles des angles extérieurs
(comme ^xAC).
3/ L'apothème mesure r × sin(α/2);
4/ Un côté mesure 2r × cos(α/2).
5/ Le périmètre d'un polygone régulier à n côtés est donc 2nr × cos(α/2);
6/ L'aire d'un polygone
régulier à n côtés de mesure c, d'apothème a, est mesurée par
a × nc/2, produit de l'apothème par le
demi-périmètre du polygone; c'est aussi, eu égard à 3/ et 4/ :
½nr2sin
α.
♦ Le cas de l'hexagone régulier ci-dessus est particulièrement simple : α° = 180 - 360/6 = 120° (en radians : α = π - π/3 = 2π/3). L'angle au centre ^AOB mesure 60° (π/3). L'apothème mesure r × sin(π/3) = r√(3)/2; le côté mesure r; l'aire est ½
nr2sin
α = 3r2√(3)/2.
♦ Le cas de l'octogone régulier est moins évident si l'on recherche des valeurs exactes : α° = 180 - 360/8 = 135° (en radians : α = π - 2π/8 = 3π/4). L'angle au centre ^AOB mesure 45° (π/4).
∗∗∗
Montrer que la mesure exacte de l'aire de l'octogone régulier de rayon r est 2r2√2.
» calcul des valeurs exactes de sin(π/8) et cos(π/8)
Constructibilité :
La possibilité de construire un polygone régulier aux seuls moyens de la règle et du compas, construction au sens d'Euclide, n'est pas assurée. Construire un polygone régulier, c'est :
soit construire un côté quelconque, comme [AB], ci-dessus l'obtention du polygone se faisant ensuite par report au moyen de la règle et du compas.
soit construire l'angle caractérisant le polygone (angle α ci-dessus), ce qui revient à construire l'angle au centre correspondant aux côtés, donc à se ramener au cas 1. Dans le cas ci-dessus de l'octogone régulier (8 côtés), il s'agira de savoir construire un angle de 360°/8 = 45°. Dans le cas général d'un polygone régulier à n côtés, ce sera un angle géométrique de mesure 2π/n (en degrés, 360°/n).
➔ Construire l'angle α se ramène à construire un segment dont la mesure est celle de son sinus ou de son cosinus. Le premier acte de la figure est alors le tracé d'un cercle, que l'on peut supposer de rayon 1, dans lequel s'inscrira le polygone régulier.
Cet aspect angulaire de la situation conduit à une nouvelle définition d'un polygone régulier :
Un polygone Pn à n côtés est
dit régulier s'il existe un point O pour lequel
Pn est invariant
dans la rotation de centre O d'angle 2π/n.
k désignant un entier naturel non nul, il est clair que (en identifiant un angle à sa mesure) :
si un angle â est constructible, tout multiple k × â de cet angle est constructible;
si un angle â est constructible, sa moitié â/2 est
constructible et, plus généralement, â/2k est constructible;
si deux angles sont constructibles, leur somme et leur différence est constructible;
toute combinaison linéaire à coefficients entiers d'angles constructibles est constructible.
En conséquence, est ce résultat de Gauss (1801) :
Propriété 2 :
Si u et v sont des entiers premiers entre eux et si 2π/u et 2π/v sont constructibles, alors 2π/(uv) est constructible
Preuve : u et v étant premiers entre eux, on peut appliquer le théorème de Bézout : il existe deux entiers a et b de Z tels que au + bv = 1. Ce qui permet d'écrire 1/uv = a/v + b/u, donc 2π/uv = a × 2π/v + b × 2π/u, d'où le résultat annoncé.
Sachant que le triangle équilatéral (angle au centre 2π/3) et le pentagone régulier (angle au centre 2π/5) sont constructibles, on déduit que le pentadécagone régulier (15 côtés) est constructible,
En 1796, Gauss construisit l'heptadécagone régulier (17 côtés) et prouva la non constructibilité de l'ennéagone (9 côtés, »
Al Biruni). Il énonça qu'un polygone régulier à n côtés, n impair, est constructible si, condition suffisante, n est un nombre de Fermat premier :Il affinera sa condition sous une forme plus générale qui sera entièrement démontrée par Wantzel en 1837 :
Pn est constructible à la règle et au compas
seuls ssi le nombre n de côtés
est de la forme
2kF1F2...Fm
où k est entier
et les Fi des nombres de Fermat
premiers
comme 3, 5, 17, 257
Euclide réussit à construire le pentadécagone régulier (n =15) : les angles au centre font 24° = 360°/15. Or 24 = 2 × 72 - 120 et 72 et 120 sont respectivement les angles au centre du triangle équilatéral et du pentagone régulier.
Propriété 3 :
Si un polygone régulier Pn
Preuve : En effet, en traçant les médiatrices de chacun
des côtés de Pn, comme
[AB] ci-dessous, on obtient deux côtés consécutifs de P2n
.
Propriété 3bis :
Si un angle â est constructible, il en est de même â/2 et plus généralement de â/2k.
∗∗∗
Deux côtés parallèles d'un polygone
régulier sont dits
opposés.
Prouver qu'un polygone régulier possède des côtés opposés si et seulement si son
nombre n de côtés est pair.
Propriété 4 :
Pour tout polygone régulier Pn
à n côtés :
La médiatrice d'un côté passe par le centre de son cercle circonscrit; de plus :
Si n est pair, elle est aussi médiatrice du côté opposé;
Si n est impair, elle passe par le sommet opposé.
Voici les polygones réguliers à n côtés constructibles (en vert) et non constructibles (en rouge), n ≤ 20 :
3 , 4 , 5 , 6 , 7 , 8 , 9 , 10, 11 , 12 , 13 , 14 , 15 , 16 , 17 , 18 , 19 , 20
♦ Le cas n = 4 (carré) se construira aisément en traçant un cercle et deux diamètres perpendiculaires. Ces diamètres sont alors les diagonales du carré :
∗∗∗
Construire à la règle et au compas (au
sens d'Euclide) un carré dont on a préalablement tracé un des côtés.
♦ Le cas n = 5 (pentagone) est constructible en vertu de la condition de Gauss puisque 5 = 2
2 + 1, mais la construction n'est pas simple ! Et il s'avère plus aisé de construire tout d'abord au décagone régulier, puis de choisir un point sur deux.
Construction des pentagone, décagone et pentadécagone réguliers : » Pentagramme : »
Le Pentagon régulier du département de la Défense
des États-Unis (Arlington, Virginie)
∗∗∗
Construire à la règle et au compas (au
sens d'Euclide) un carré dont on a préalablement tracé un des côtés.
♦ En vertu de P3, le cas n = 8 (octogone régulier, du grec et latin octo = huit) s'obtiendra à partir des sommets du carré en traçant les deux médiatrices des côtés opposés coupant le cercle en 4 nouveaux points.
♦ Le cas n = 6 (hexagone régulier, du grec hexa = six) est bien connu des jeunes élèves pour l'obtention de rosaces, par reports du rayon à partir d'un point quelconque du cercle dans lequel il s'inscrira.
♦ Le cas du triangle équilatéral (n = 3) est également bien connu dès l'école primaire : un côté [AB] étant tracé, on obtient les deux autres à l'une des intersections des cercles de centre A et B, de rayon AB.
Le triangle équilatéral inscrit peut s'obtenir à partir de l'hexagone régulier en choisissant un point sur deux :
Inversement, en vertu de P3, on peut construire l'hexagone régulier à partir du triangle équilatéral en traçant les médiatrices de chacun de ses côtés.
∗∗∗
On vient de voir qu'il est très facile de construire un triangle équilatéral dont on a préalablement
tracé un côte.
Mais sauriez-vous construire à la règle et au compas (au
sens d'Euclide) un triangle équilatéral inscrit
dans un cercle préalablement tracé et dont on a seulement placé le sommet C ?
☼
♦ En vertu de P3, le cas n = 12 (dodécagone régulier, du latin issu du grec dodeca = douze) s'obtient en traçant les trois médiatrices des côtés opposés de l'hexagone régulier.
∗∗∗
La Pulsatille des Alpes (Anemone alpina) - Les
pointes des pétales forment un heptagone régulier
♦ En vertu du théorème de Gauss-Wantzel, les cas n = 7 (heptagone, du grec hepta = sept) et n = 11 (hendécagone , du grec hen = un, ou undécagone), ne sont pas constructibles.
♦ Le pentadécagone (n = 15, du grec penta = cinq, deka = dix), est constructible : il vérifie le théorème de Gauss-Wantzel avec k = 0, F1 = 3, F2 = 5)
♦ L'heptadécagone (n = 17, du grec hepta = sept, deka = dix) est constructible : 17 = 24 + 1 = 2(2²).
Construction approchée de l'ennéagone par Al-Biruni : »
L'hendécagone régulier (11 côtés, du grec hen = un,
hendeka = onze)
Le dodécagone régulier (12 côtés)
∗∗∗
Donner une approximation du nombre π en calculant le périmètre du tétraicosagone
régulier rayon 1
➔ On parle aussi de polygone (régulier) étoilé. Par exemple, à partir du décagone régulier convexe, en joignant un sommet sur 3, on obtient le décagone étoilé :
⇒
» Coxeter
Pentagramme : » Périmètre du cercle : » Pavages : »
∗∗∗
Dans un polygone régulier, on appelle
apothème la distance
(commune) du centre à l'un des côtés (»
aire d'un disque).
Soit p le périmètre du polygone, et a son apothème. Montrer que son aire est S =
½ap.
Kiosque octogonal - Parc du château de
Fontainebleau
➔
Pour en savoir plus :ThÉorie des corps, la règle et le compas, par Jean-Claude Carrega. Éd. Hermann - Paris, 1989
La construction des polygones réguliers au XVIIè siècle, Ingénieurs et
Mathématiciens , par Dominique Raynaud, univ. Grenoble
(une étude construction approchée versus construction selon Euclide) :
https://www.academia.edu/14133509/
Construire des polygones réguliers : https://www.monclasseurdemaths.fr/profs/construire-des-polygones-réguliers/