ChronoMath, une chronologie des MATHÉMATIQUES
à l'usage des professeurs de mathématiques, des étudiants et des élèves des lycées & collèges

EISENSTEIN Gotthold Ferdinand Max, allemand, 1823-1852

Issu d'une famille de six enfants atteints par la méningite, maladie extrêmement contagieuse, Ferdinand sera le seul des enfants à survivre mais sa santé restera fragile. Élève brillant, il se passionne pour les mathématiques et s'inscrit à l'université de Berlin (1843), sa ville natale où il fut l'ami de Kronecker.

Eisenstein se fit rapidement connaître par une publication dans le Journal de Crelle relative à l'emploi des substitutions linéaires (x = aX + bY, y = cX + dY) dans l'étude des formes quadratiques, sur lesquelles Gauss travaillait dans le prolongement des recherches entreprises par Lagrange sur le sujet, et qui conduiront Hamilton et Sylvester au calcul matriciel.

Le célèbre et influent naturaliste et explorateur Alexander von Humboldt (1789-1859) le prendra sous sa protection : il étudiera auprès de Gauss à Göttingen et de Hamilton en Irlande et obtiendra, parrainé par Jacobi, une chaire à l'université de Berlin (1847) où il sera nommé académicien peu avant sa mort, à 29 ans, atteint de tuberculose.

Ce triste destin rappelle celui du célèbre mathématicien norvégien Niels Henrick Abel

Ses travaux les plus significatifs portèrent sur les formes quadratiques (théorie des invariants), la théorie analytique des nombres et les fonctions elliptiques dont la théorie, développée au moyen des fonctions méromorphes, plus audacieuse que celle de Jacobi, fit l'admiration de Riemann et fait encore aujourd'hui autorité.

Anneau Z(j) des nombres (ou entiers) d'Eisenstein :

A l'instar de Gauss qui avait défini ses entiers complexes, Eisenstein étudie les nombres complexes de la forme a + bj où j désigne la racine cubique primitive complexe de l'unité d'ordonnée positive :

a et b désignant des entiers relatifs.

On sait que 1 + j + j2 = 0, (» Gauss), ce qui permet de constater que muni de l'addition et de la multiplication usuelle de C, ces nombres constituent un anneau commutatif unitaire, noté Z(j), inclus dans l'extension de corps Q(i√3). Leur norme est N(a + bj) = (a + bj)(a + bj) = a2 - ab + b2. Les unités de cet anneau (éléments inversibles) se limitent à 1, j, j2 = j et leurs opposés.

Un nombre d'Eisenstein est premier si ses diviseurs se limitent à lui-même et aux unités de l'anneau.


Montrer, comme affirmé ci-dessus, que les unités de Z(j) se limitent à 1, j, j2 = j et leurs opposés en recherchant les entiers tels que a2 - ab + b2 = 1. On cherchera à résoudre cette équation d'inconnue a en fonction de b et on constatera que y = 0 ou ±1.

Nombres algébriques, entiers algébriques :  »

L'étude de la divisibilité dans cet anneau permit à Eisenstein d'énoncer des conditions de primarité (en franglais : primalité) dans l'arithmétique usuelle de N. En particulier :

Tout nombre premier dans N de la forme 3n + 1 est décomposable additivement sous la forme a2 + 3b2  (a et b entiers)

Ce sont des nombres non premiers dans Z(j), de la forme (a + bj)(a + bj) = N(a + bj) norme, au sens des entiers algébriques de u + vj (car j2 = j).

Divisibilité dans un anneau :  »

Polynôme irréductible, polynôme primitif, théorème ou critère d'Eisenstein :

Un polynôme p de degré n sur un anneau commutatif K (polynôme à coefficients dans K) est dit réductible sur K s'il existe un polynôme q1 de K[X]  de degré m non nul, m < n, qui divise p : il existe alors q2 de K[X] tel que p = q1q2. Dans le cas contraire, on dit que p est irréductible sur K.

Division par x - α :  »              Étude théorique de la divisibilité dans un anneau :  »

Polynôme primitif p* d'un polynôme p de Q[X] :    

Considérons le cas d'un polynôme p de Q[X]. Ses coefficients sont rationnels, éventuellement entiers (ZQ). Soit µ le PPMC des dénominateurs de ses coefficients. p peut s'écrire q/µ avec q∈Z[X]. Soit maintenant δ le polynôme le PGCD des coefficients de q. Le polynôme p* = q/δ est à coefficients entiers premiers entre eux. On l'appelle polynôme primitif de p. On remarquera que les équations p(x) = 0 et p*(x) = 0 sont équivalentes.

On a ce résultat bien évident :

Les assertions p est irréductible sue Q et p* est irréductible sur Z sont équivalentes.

Divisibilité dans un anneau :  »                 » polynôme scindé


Un polynôme P de K[X], de degré 2 ou 3 ne possédant pas de zéros dans K est irréductible sur K.
(raisonner en supposant P réductible)

Critère d'Eisenstein :    

Soit P = ao + a1X + a2X2 + ... + anXn un polynôme de Z[X]; s'il existe un entier naturel p premier divisant tous les ai sauf an , p2 ne divisant pas ao , alors P est irréductible sur Z[X] et, par là, sur Q[X].

Ce résultat se généralise à un anneau commutatif A[X]. Hilbert donnera (1892) une extension de ce critère pour des polynômes à plusieurs variables.

 ! L'appellation critère, traditionnellement rencontrée pour ce résultat, n'est pas vraiment appropriée : un critère est plutôt une règle permettant de distinguer le vrai du faux par épuisement de tous les cas possibles; il s'agit ici d'une propriété suffisante, non nécessaire :


Montrer que si p est premier, le polynôme 1 + X + X2 + .... + Xp-1 est irréductible sur Q[X].
» Indications : (X + 1)p - 1 est divisible par X. Montrer que le quotient  vérifie le critère d'Eisenstein en remarquant
qu'il s'écrit comme la somme de k = 1 à p des Cpk Xk-1


Betti  Houël

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