ChronoMath, une chronologie des MATHÉMATIQUES
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Trièdre de Darboux-Ribaucour
 
     » Sections principales, courbures moyenne et totale | Théorèmes de Meusnier | Indicatrice de Dupin | Trièdre de Frenet

Considérons une surface Σ définie par la donnée des coordonnées gaussiennes x, y et z de ses points :

x = f(u,v) , y = g(u,v) , z = h(u,v)

On suppose que x, y et z sont des fonctions au moins deux fois continûment dérivables en u et v (classe C2) et que la normale à la surface est bien définie dans un voisinage V d'un point M (point non singulier). Dans ce cas Σ admet en M un plan tangent (T) dont un vecteur normal est colinéaire au vecteur ν(J1, J2, J3) avec :

J1 = D(g,h)/D(u,v), J2 = D(h,f)/D(u,v), J3 = D(f,g)/D(u,v)

J1, J2 et J3 non tous nuls désignant les jacobiens relatifs à f, g et h.

    Dans le cas d'une surface définie par une équation implicite de la forme f(x,y,z) = 0, la normale est alors dirigée par le vecteur de coordonnées  fx'(x,y,z) , fy'(x,y,z) , fz'(x,y,z).

Orientation d'une surface, Trièdre mobile de Darboux-Ribaucour ou Trièdre géodésique :

Dans les conditions précédentes, au voisinage de M, la surface comporte deux faces, l'une est dite positive et correspond conventionnellement à la normale ν(J1, J2, J3). L'autre, négative, correspond à -ν(-J1, -J2, -J3). Quitte à le diviser par sa norme, on peut supposer que ν est unitaire.

Lorsque l'application M → ν est continue, on dit que la surface Σ est orientable. Il y a alors deux orientations possibles permettant, dans le cas d'une surface fermée (close au sens des variétés topologiques, comme la sphère), de définir un intérieur et un extérieur. Si la surface Σ ne rencontre pas le plan tangent T au voisinage de tout M de Σ (à l'exception de M), on dira que cette surface est convexe.

Les surfaces "usuelles" et leurs équations : »

- t est le vecteur unitaire tangent à (c) en M orienté dans le sens des abscisses curvilignes croissantes;
- r est le vecteur unitaire situé dans (T) tel que (ν, t , r) soit orthonormé direct : r égale donc ν ^ t , produit vectoriel de ν par t.

Trièdre mobile de Darboux-Ribaucour :     

Soit maintenant (c) une courbe contenant M tracée sur la surface Σ. Le triplet (t , r, ν) est appelé trièdre géodésique ou trièdre de Darboux-Ribaucour de (c) au point M, r est appelée normale géodésique de (c) sur Σ au point M.

Ce triplet est un repère mobile généralement distinct du trièdre de Frenet relatif à l'étude des courbes gauches car ν, dirigeant la normale en M au plan tangent (T) est à distinguer de n, normale principale à la courbe (c) :

Courbures, torsions, lignes asymptotiques, lignes de courbure :

En notant R le rayon de courbure de (c) en M, on appelle :

En notant T la torsion de (c) en M, on appelle :

Formule de Bonnet : »

Formules de Darboux-Ribaucour :

Le vecteur n étant orthogonal à t, il est élément du plan engendré par ν et r et on a : n = ν.cosθ + r.sinθ. À l'instar des formules de Serret-Frenet et en conséquence de ces dernières -par changement de repère- les formules de Darboux-Ribaucour s'énoncent matriciellement dans le repère (t , r, ν) par :

    Il est intéressant de remarquer que si deux courbes (c) et (c') tracées sur Σ ont la même tangente en M, alors leurs courbures normales sont égales. Sur ce sujet, on doit au mathématicien français Meusnier, deux théorèmes importants :

Premier théorème de Meusnier :   

Les courbes tracées sur Σ passant par M, ayant en ce point même plan osculateur (c'est à dire ayant "le même θ"), ont le même centre de courbure.

Second théorème de Meusnier :  

Considérons une section quelconque (ou dit aussi oblique : section par un plan ne contenant pas de normale à la surface) d'une surface Σ par un plan P suivant une tangente (t) en un point M de Σ. Alors, le rayon de courbure au point M de cette section est la projection sur P du rayon de courbure de la section normale (contenant ν) au même point suivant la même tangente (t).

Ces considérations permettent de réduire l'étude locale de la courbure en un point d'une surface à l'étude des sections normales en ce point et, par là, à l'étude de la courbure d'une courbe plane.

» Meusnier

Calcul du rayon Rn de la courbure normale :

Soit (γ) une section normale d'une surface Σ définie par une équation de la forme z = f(x,y) où f est deux fois continûment dérivable en x et en y. Considérons les dérivées partielles suivantes :

Si (a,b,c) désigne le triplet de coordonnées du vecteur unitaire tangent à (γ) en M, on démontre relativement facilement que :

C désignant le centre de courbure de (γ) en M, le rayon de courbure normale Rn = CM est ici algébrique : positif si CM a même sens que la normale (i.e. le vecteur normal), négatif sinon.

   Choisissons comme repère de travail, le repère orthonormé mobile d'origine M situé sur (γ) avec comme "axe des z" celui dirigé par la normale à la surface; appelons φ l'angle ^(Mx, Mt) entre Mx et la tangente Mt à (γ) au point M.

On a ici p = q = 0 car la section normale admettant le plan (M,Mx,My) de coordonnées comme plan tangent, le contact en M est d'ordre 2. Dans ces conditions, le rayon de courbure des sections normales en M vérifie :

1/Rn = r.cos2φ + 2s.sinφcosφ + t.sin2φ

Euler établit la formule suivante, qui porte son nom :

où φ désigne ici l'angle que fait la tangente à une section principale avec la première direction principale. On voit que R1 correspond à φ = 0 et R2 à φ = π/2. Il suit, des deux formules précédentes évaluant 1/Rn , que dans le cas d'une section principale et pour un choix pertinent du repère défini supra : Mx dirigé par la première direction principale, on a :

r = ∂²z/∂x² = 1/R1 , s = ∂²z/∂x∂y = 0 , t = ∂²z/∂y² = 1/R2

Sections principales d'une surface, Courbure moyenne, Courbure totale :

Euler prouva (Recherches sur la courbure des surfaces, 1760) que parmi toutes les sections normales en un point M d'une surface, obtenues en faisant "pivoter" le plan de section autour de la normale, il en existe deux correspondants à des plans perpendiculaires pour lesquels les courbures (notées 1/R1 et 1/R2 ) sont respectivement minimale et maximale.

Ces plans sont dits principaux et les sections correspondantes sont dites principales. Les directions contenant les tangentes à ces sections sont appelées directions principales de la surface. Les courbures et les rayons de courbure sont semblablement qualifiés.

   Pour une surface de révolution, les rayons de courbure principaux en un point M sont :

  1. le rayon de courbure AM du méridien en M, obtenu par section avec le plan passant par l'axe de révolution et par M;

  2. le rayon CM, porté par la normale en M, C appartenant à l'axe de révolution.

Exemple, le cas du tore :        

Le cas du tore est intéressant : (d) est son axe, (c) est le cercle générateur de rayon r. Le rayon de giration est HA (figure ci-dessous).

• Si M est situé à une distance KM de l'axe, inférieure à HA (figure de droite) alors les rayons de courbure principaux sont R1 = CM et R2 = AM; ils sont de signes contraires.

• Si M est situé à une distance KM de l'axe, supérieure à HA (figure ci-dessous) , alors les rayons de courbure (nombres algébriques) principaux sont R1 = CM et R2 = AM, orientés comme la normale.

On définit alors :

 Le nombre H = (1/R1 + 1/R2)/2 = (K1 + K2)/2 appelé courbure moyenne ou courbure de Germain. 

 Sophie Germain , Meusnier


 Le nombre K = 1/R1R2 = K1K2 est appelé courbure totale ou courbure gaussienne.

Theorema egregium de Gauss (1827) :    

La courbure totale d'une surface est préservée par isométrie locale

Logiciel Naval Designer, cf. Ch. 6 : »           » Bonnet

Calcul effectif de la courbure en un point, formes fondamentales :

Première forme quadratique fondamentale :    

On suppose que la surface Σdéfinie est donnée par ses coordonnées gaussiennes (u,v) →φ(u,v), vecteur de R3 de coordonnées x = f(u,v), y = g(u,v), z = h(u,v). On suppose en outre φ au moins deux fois continûment dérivables en u et v (classe C2) et que la normale à la surface est bien définie dans un voisinage V du point M(x,y,z) considéré (point régulier).

Considérons au voisinage de M, un élément linéaire ds de la surface on a : ds2 = dx2 + dy2 + dz2. Or :

En remplaçant dans ds2, on obtient facilement :

(∂φ/∂u)2 et (∂φ/∂v)2 désignent les carrés scalaires des vecteurs ∂φ/∂u et ∂φ/∂v. On écrit généralement ds2 sous la forme :

c'est la première forme quadratique fondamentale dont le discriminant réduit F2 - EG va intervenir dans le calcul des courbures moyenne et totale H et K. C'est à Gauss que l'on doit ce résultat fondamental dans ses Recherches sur la théorie générale des surfaces courbes (1827).

Seconde forme quadratique fondamentale :    

On a vu ci-dessus, dans le cas d'une surface donnée par z = f(x,y) que l'on peut calculer la courbure normale : Kn = cosθ/R. Les formules de Darboux-Ribaucour :

montrent que le produit scalaire  tdν/ds = t(-Kn.t - Tg.r) = - Kn car t est orthogonal à r. Mais t = dM/ds, d'où dMdν = -Kn.ds2. Appelons alors a, b et c les coordonnées de ν que l'on sait calculer par φ/∂uφ/∂v et qu'il faudra normer.

dν est alors donné par :

et dM (calculé ci-dessus) par :

On fait le produit scalaire (calcul un peu long mais aucune difficulté) et on pose traditionnellement :

On obtient :

Le second membre est appelé seconde forme quadratique fondamentale et son discriminant réduit M2 - LN va maintenant intervenir dans le calcul des courbures moyenne et totale H et K. On démontre en effet, mais ce n'est pas simple que :

 i  Prouvés par Gauss en 1827, ces calculs et résultats avaient été établis antérieurement par Rodriguès dans un mémoire de 1815.

Ayant calculé H et K, en remarquant que l'on connaît alors :

2H = K1 + K2  et  K = K1K2

On pourra calculer les courbures minimale et maximale comme solution de l'équation du second degré

x2 - 2Hx + K = 0

Expression de la courbure totale :    

En un point régulier d'une surface ou si une surface est définie localement par une ligne de niveau comme z = f(x,y), la présence d'un plan tangent conduit à un calcul relativement simple de la courbure totale. En posant r = ∂2z/∂x2, s = ∂2z/∂x∂y et t = ∂2z/∂y2, on peut démontrer que la courbure totale est alors :

K = rt - s2

Indicatrice de Dupin et courbure locale : »

Exemple simple :       

On considère le cylindre droit de rayon r (rien à voir avec le r ci-dessus !) donné par son équation x = r.cosu, y = r.sinu, z = v, surface réglée développable. Vérifions que sa courbure totale est nulle. On a ici :

 

Par conséquent la courbure totale est K = 0 (on s'y attendait...) et la courbure moyenne : H = -1/2r.

    Le cylindre est une surface développable (applicable sur le plan). D'une manière générale, toute surface développable est de courbure totale K = 0 et H non nul.

Notion de surface applicable : »


Par un calcul semblable, montrer dans le cas de la sphère de centre O, de rayon r, on a K = 1/r2 et H = -1/r.
Rappel : x = r.cos u.cos v , y = r.cos u.sin v , z = rsin u


Plus dur... : cas du ruban de Möbius d'équation : x = (r + u.cosv).cos2v, y = (r + u.cosv).sin2v, z = u.sinv. S'il est développable, la courbure gaussienne K est nulle tout partout. Le calcul de ∂φ/∂v est assez lourd...
On se contentera du cas u = 0, ce qui correspond au cercle sur lequel s'appuie la surface. Vous devriez trouver E = 1,
F = 0, G = r2, L = 0, 4M = cos2v, N = r2sin2v. D'où 4K = -cos2v. Conclure.


   Pour en savoir plus :

  1. Cours de mathématiques, tome 1, Ch. 21 par Jean Bass, Éd. Masson et Cie - Paris, 1964.
  2. COURS DE MATHEMATIQUES. Tome 3, Géométrie et cinématique, 2è édition, Ch. VII, par J. Lelong-Ferrand, J.-M. Arnaudiès
    Classes préparatoires, 1er cycle universitaire - Dunod Université - 1993.
  3. ABRÉGÉ D'HISTOIRE DES MATHÉMATIQUES, Jean Dieudonné
    Ch IX, Géométrie différentielle par Paulette Libermann, Ed. Hermann - 1978 ,1992
  4. Cours de mathématiques supérieures par M. l'abbé E. Stoffaes, Ed. Gauthier-Villars, Paris - 1930
  5. APPLICATION DE L'ANALYSE A LA GÉOMÉTRIE, Gaspard Monge
    Les cours historiques de l'Ecole Polytechnique (1807), Ed. MARKETING (ellipses) - 1994
  6. ATLAS DES MATHEMATIQUES, Fritz Reinhardt, Heinrich Soeder, Ch. géométrie différentielle
    La Pochothèque - Le Livre de Poche (collection Encyclopédies d'aujourd'hui), 1997
  7. Courbes et surfaces par Jean Taillé, Que sais-je ?, n° 564, P.U.F.
  8. Courbes et surfaces, un cours de Boris Thibert (univ. Joseph Fourier) :
    http://ljk.imag.fr/membres/Bernard.Ycart/mel/cs/cs.pdf
  9. Quelques aspects des surfaces minimales, par Alexis Michelat et Sheng Yuan Zhao ENS) :
    https://www.math.ens.fr/enseignement/telecharger_fichier.php?fichier=1432

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