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! On ne le confondra pas avec le célèbre poète allemand Heinrich Heine (1797-1856) !
Fils d'un banquier berlinois, Heinrich Heine fis ses études secondaires en sa ville natale où il fait montre de son intérêt pour les mathématiques. Après un court séjour à Göttingen où il suit les cours de Gauss et Stern, il retourne à Berlin où il obtient son doctorat dirigé par Martin Ohm (1842). Heine fut professeur à l'université de Halle dès 1848 et durant toute sa carrière.
Les travaux de Heine portent en analyse et furent influencés par ceux de Weierstrass et de Cantor (lequel enseignait à Halle à la même époque). Ils s'inscrivent donc dans un souci de rigueur et concernent principalement la convergence des séries trigonométriques de Fourier, les polynômes de Legendre, la construction des nombres réels au sein de sa théorie des fonctions (Die Elemente der Funktionen Lehre, 1872, » réf.1) en tant que limites de suites de nombres rationnels (parallèlement à celle de Cantor), le concept de continuité uniforme.
En théorie du potentiel, on lui doit également des recherches sur les surfaces sphériques et les fonctions de Lamé (Handbuch der Kugelfunktionnen = Traité des fonctions sphériques, 1861 et 1878-81).
Le concept de continuité uniforme : |
On doit à Heine la distinction entre continuité simple et continuité uniforme, condition plus forte de "régularité" en quelque sorte :
Si f est une fonction numérique (f : R→R) ou plus généralement, f : E→F, E et F désignant des espaces métriques dont les distances sont notées d, la continuité simple sur un intervalle J (c'est à dire en tout point de J) s'écrit (si E = F = R, d(x,y) = | x - y |) :
»
le "h" dépend du xo pour lequel on étudie la
continuité.
La continuité uniforme s'écrit :
»
le "h" ne dépend pas du xo pour lequel on étudie la
continuité.
C'est une continuité plus forte que la continuité simple. Cette propriété avait été préalablement utilisée (sans la formaliser) par Dirichlet dans les problèmes de convergence des séries de fonctions sur un intervalle fermé borné.
Contre-exemple :
Prenons le cas de la fonction f(x) = sin(1/x). Elle est manifestement continue sur ]0,1] comme composée de fonctions continues sur cet intervalle. Au voisinage de zéro, il se passe de très vilaines choses : choisissons x = 1/(nπ) et x' = 2/(nπ). Lorsque n devient infini, d(x,x') tend vers 0.
On pourrait alors s'attendre à ce qu'il en soit de même pour d(f(x),f(x')). Or d(f(x) - f(x')) = |f(x) - f(x')| = 0 ou 1 alternativement suivant la parité de n : la fonction n'est pas uniformément continue sur cet intervalle.
∗∗∗
Prouver que x
→1/x,
continue sur ]0,1], n'est pas uniformément continue sur cet intervalle.
On pourra considérer x = 1/n et x' = 2/n (n entier) pour un e convenablement
choisi.
L'ennui de ces deux contre-exemples est causé par la borne 0 de l'intervalle d'étude : voici un résultat auquel on pouvait s'attendre :
Théorème de Heine (1872), également appelé de Heine-Borel, et parfois théorème de Cantor : |
Toute fonction continue sur un intervalle fermé [a,b] est uniformément continue sur [a,b].
Version "moderne" :
E et F désignant des espaces métriques, si E est compact, toute application continue f de E vers F est uniformément continue.
➔ Pour en savoir plus :
Les constructions des nombres réels
dans le mouvement d'arithmétisation de l'analyse
par
Jacqueline Boniface,
IREM - Histoire des mathématiques - Éd. Ellipses, Paris - 2002