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La notion de fonction périodique semble simple et pourtant... C'est quoi la période d'une fonction dite périodique ? Pas vraiment évident... L'objectif est de montrer que si une fonction est périodique et non constante, ses périodes sont les multiples kT, k décrivant Z, d'une même période T, plus petit élément strictement positif tel que f(x + T) = f(x).
» Cette page s'appuie sur le chapitre III d'analyse, §6 du cours de mathématiques générales de MM Pisot et Zamansky. Dans la partie A, niveau 1èreS/TerS, on apporte définition et exemples. La partie B s'adresse à des étudiants en mathématiques.
Partie A :
Définition 1 :
Soit f une fonction numérique. Notons Df son ensemble de définition. On dit que f est périodique pour exprimer qu'il existe un nombre réel non nul u vérifiant la propriété suivante :
Si x∈Df, alors x + u∈Df et f(x + u) = f(x) (p)
1°/ On suppose f périodique. Montrer que si u vérifie (p) ci-dessus, alors il en est de même de ku pour tout entier naturel k.
2°/ On suppose f périodique. Montrer que si u vérifie (p) ci-dessus, alors si x - u∈Df , -u et -ku vérifient (p) pour tout entier naturel k.
Définition 2 :
Tout réel vérifiant (p) est une période de f.
Définition 3 :
On appelle période fondamentale de f le plus petit nombre réel u strictement positif, s'il existe, vérifiant (p). Soit T ce nombre. On dit que f est T-périodique ou bien de période T. On dira aussi, simplement, que T est la période de f.
Les fonctions sinus et cosinus sont 2π-périodiques. Mais on peut dire que 4π est une période de la fonction sinus.
Les lignes qui suivent s'adressent au niveau Bac + n, n ≥ 1...
En fait la difficulté est dans cette définition 3 : on voit, avec les exemples donnés et les questions 1° et 2°, que tout multiple d'une période est encore une période et parler de plus petit élément d'un sous-ensemble de R est problématique car :
Toute partie minorée de R admet une borne inférieure » ensembles bornés de nombres réels
Mais pas nécessairement un plus petit élément. Raison pour laquelle, la définition 3 précise s'il existe ! Cette partie étudie les divers cas pouvant se présenter.
Partie B :
On considère une fonction numérique f définie sur R tout entier. Vu que f(x + 0) = f(x), on admet de considérer ici que 0 est une période de f et on suppose que f admet au moins une période non nulle u. On note U l'ensemble des périodes de f.
1°/ Montrer que (U,+) est un sous-groupe du groupe additif (R,+) des nombres réels.
2°/ On se propose de prouver que si U admet un point d'accumulation, alors U est dense dans R. Soit ]a,b[, a < b, un intervalle ouvert (borné) de R. Rappel : On dit qu'une partie A de R est dense dans R pour exprimer que tout réel x est limite d'une suite d'éléments de A.
a/ On suppose tout d'abord que 0 est un point d'accumulation de U. Il existe donc une suite (un) de points de U qui converge vers 0. En remarquant que si n est suffisamment grand, on a | un | < b - a, montrer que U est dense dans R.
b/ On suppose maintenant que α est un point d'accumulation non nul de U. Il existe donc une suite (un) de points de U qui converge vers α. Montrer, en utilisant que (un) est une suite de Cauchy, que l'on peut se ramener au cas précédent et donc que U est dense dans R.
3°/ On suppose maintenant que U ne possède pas de point d'accumulation. D'après la Partie A, on peut se restreindre aux éléments strictement positifs de U. Soit J = [0,a], a > 0, un intervalle fermé borné de R contenant au moins une période de f. Selon le théorème de Bolzano-Weierstrass, on sait que tout ensemble infini et borné de nombres réels admet au moins un point d'accumulation. En déduire que le nombre de périodes présentes dans J est fini.
4°/ On considère l'ensemble des périodes u1, u2, ..., un présentes dans J avec u1 < u2 < ... < un. Soit up l'une d'elles. En remarquant que u1, 2u1, 3u1 ..., ku1, (k + 1)u1, ... sont des périodes de f, montrer qu'il existe un entier naturel k tel que ku1 = up. C'est dire que dans ce cas :
les périodes de f sont les multiples de la plus petite période strictement positive
Pour la fonction sinus, par exemple et par construction même, la période fondamentale est 2π. Les périodes sont les multiples de 2π.
5°/ Montrer que la fonction f définie par f(x) = x - E(x) pour tout x réel est périodique. Préciser sa période fondamentale. E(x) désigne la partie entière usuelle de x : si n ≤ x < n + 1, n ∈ Z, alors E(x) = n.
6°/ On suppose U dense dans R. Montrer que pour tout xo de R, l'ensemble Uo = {xo + u, u∈U} est dense dans R. En déduire que si f est continue et périodique, alors f est constante.
➔ On retiendra finalement, de 3° et 4° que si les périodes de f sont isolées (leur ensemble n'admet pas de point d'accumulation), alors elles sont de la forme kT, k décrivant Z, T désignant le plus petit élément strictement positif tel que f(x + T) = f(x).
On retrouve ainsi la définition donnée au lycée et rencontrée pour les fonctions trigonométriques classiques ou les fonctions définies périodiques par construction comme :
Soit f la fonction définie par :
Réponses
Partie A :
1°/ Pour k = 2, si x∈Df, alors x + u∈Df et x + 2u = (x + u) + u∈Df . D'autre part f(x + 2u) = f [x + u) + u)] = f(x + u) = f(x). On montrera alors par récurrence, de façon analogue, que si x + (k - 1)u∈Df et f [x + (k - 1)u] = f(x), alors x + ku∈Df et f [x + ku] = f(x).
2°/ Pour x appartenant à Df , si x - u∈Df , on peut écrire f(x) = f [(x - u) + u] = f(x - u). De la même façon, en écrivant f(x) = f [(x - ku) + ku] et en appliquant 1°, on obtiendra f(x) = f(x - ku).
Partie B :
1°/ Par convention, on a supposé que 0 est une période de f. Il suffit maintenant de prouver que si u et u' sont deux périodes de f, alors u - u' en est une :
f(x + u - u') = f [(x - u') + u)] = f(x - u') = f [(x - u') + u')] = f(x)
(U,+) est un donc un sous-groupe de (R,+).
2°/ a/ On suppose que 0 est un point d'accumulation de U. Il existe donc une suite (un) de points de U qui converge vers 0 :
∀ε > 0, ∃ Nε∈N, n ≥ Nε ⇒ | un | < ε
Par suite, il suffit de choisir ε < b - a afin d'avoir | un | < b - a pour tout n ≥ Nε.
Posons alors m = Nε et Um = {kum, k∈Z*}. Les éléments de Um sont des périodes de f et | um | étant strictement inférieur à la longueur b - a de l'intervalle ]a,b[, il existe une valeur de k telle que kum∈]a,b[. C'est dire que tout intervalle ]a,b[ de R contient au moins une période de f : U est dense dans R.
2°/ b/ Il existe une suite (un) de points de U qui converge vers α. Or, toute suite réelle convergente est une suite de Cauchy :
∀ε , ∃ Nε∈N / n > Nε , n' > Nε ⇒ |un - un'| < ε
Lorsque n et n' tendent vers l'infini, |un - un'| tend vers 0. On peut donc construire au moyen des nombres |un - un'| une suite d'éléments de U (selon 1°) convergeant vers 0. Ce qui nous ramène au cas α = 0 : dans ce cas encore, U est dense dans R.
Soit f la fonction caractéristique de Q dans R : f(x) = 1 si x∈Q, f(x) = 0 sinon. Si x est rationnel, quel que soit r rationnel, x + r est rationnel, donc f(x + r) = 1. Si x est non rationnel, quel que soit r rationnel, y = x + r ne l'est pas (sinon x = y - r serait rationnel). Donc f(x + r) = 0. C'est dire que f est périodique et ∀r∈Q, f(x + r) = f(x). Or Q est dense dans R.
3°/ Soit U' l'ensemble des périodes présentes dans J. U ne possédant pas de point d'accumulation, par contraposition du théorème de Bolzano-Weierstrass, on déduit que U' est fini on non borné. Étant borné, U' est donc fini.
4°/ u1 étant une période de f, on sait (partie A) que ses multiples u1, 2u1, 3u1 ..., ku1, (k + 1)u1, ... sont des périodes de f. Si k le plus petit entier naturel tel que ku1 ≤ up, on aura ku1 ≤ up < (k + 1)u1 et par conséquent 0 ≤ up - ku1 < u1. Si 0 < up - ku1, alors up - ku1 est une période de f présente dans J strictement inférieure à u1 : contradiction, donc up = ku1.
Pour la fonction sinus, par exemple et par construction même, la période fondamentale est 2π. Les périodes sont les multiples de 2π. un cas analogue est étudié en 5° :
5°/ Soit T > 0, une période éventuelle de f. On doit avoir f(x + T) = f(x) pour tout x. Ce qui revient à écrire x + T - E(x + T) = x - E(x). D'où E(x + T) - E(x) = T. Par conséquent T∈N. L'ensemble des périodes ne possède donc que des points isolés (pas de point d'accumulation). Selon 4°, la période fondamentale ne peut être que 1, plus petit élément strictement positif de N. Vérifions : pour tout x de R, si n ≤ x < n +1, n∈Z , alors n + 1 ≤ x + 1 < n + 2. Donc E(x + 1) = E(x) + 1 et f(x + 1) = x + 1 - E(x + 1) = f(x). En conclusion et selon 4°, l'ensemble des périodes de f est Z, ensemble des multiples de 1.
➔ La question précédente et la partie A nous enseigne que f(x - 1) = f(x) et plus généralement f(x + n) = f(x) pour tout n de Z. Le lecteur méfiant vis à vis de E(x) peut retrouver E(x - 1) = E(x) - 1 en écrivant E(x) = E[(x - 1) + 1] = E(x - 1).
6°/ Soit xo fixé dans R et x∈R. Posons y = x - xo. U étant dense dans R, il existe une suite (un) d'éléments de U tendant vers y. Par conséquent, la suite (vn) définie par vn = xo + un est une suite d'éléments de Uo qui tend vers xo + y = x. Ce qui prouve que Uo est dense dans R.
Maintenant, si x est un réel quelconque, il est limite d'une suite (vn) d'éléments de Uo de la forme vn = xo + un et, pour tout u de U, on a f(xo + u) = f(xo). un étant élément de U, on a donc f(xo + un) = f(xo). D'où lim f(xo + un) = f(xo). Mais, par continuité de f : lim f(xo + un) = f [lim(xo + un)] = f(lim vn) = f(x). Finalement f(x) = f(xo) pour tout x : f est constante.
Remarque :
On pouvait faire plus simple et plus court en utilisant le théorème de prolongement des fonctions continues se traduisant ici par si f est une fonction constante sur une partie dense, alors elle est constante partout. Ayant pour tout u de U, f(xo + u) = f(xo), f est constante sur Uo dense dans R, donc f est constante sur R.