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La
mathématique est, selon
Pythagore, la
discipline qui s'apprend (du grec
mathêmaticos forgé sur manthanein =
apprendre) et la science (au fait, en est-ce
vraiment une ?..) qui s'élabore essentiellement
par des opérations de l'esprit (radical man-, men- : du latin
mens : l'esprit). En principe, elle ne requiert pas l'observation du
monde réel, ni l'expérimentation sur la
matière.
Mais, comme science du nombre et de la mesure,
elle requiert le calcul, non seulement dans ses applications, mais
aussi à des fins didactiques et d'approfondissement
théorique.
Le calcul est certes un acte de l'esprit, mais de nature subalterne.
On y met en uvre des routines (route, itinéraire :
chemins prédéfinis). Pour en faciliter
l'exécution, l'on s'est aidé d'objets matériels
: de petits cailloux (c'est le sens latin de calculus), de
bouliers, puis de supports et de moyens d'écriture
symbolique.
Il reste que l'acte de calcul est demeuré longtemps le fait de
l'homme, une opération de l'esprit. Kronecker
a dit : "Dieu nous a donné les nombres entiers, le reste est
l'uvre de l'homme".
Les astronomes et les mathématiciens
furent souvent de très bons calculateurs (Neper
et ses tables de logarithmes, l'astronome Le Verrier, qui
découvrit (ainsi que l'anglais J.C. Adams) la planète Neptune par le calcul,
Fermat
et ses puissants calculs
arithmétiques.
La machine Pascal (1642) →
Pascal et Leibniz furent les premiers à se doter de véritables calculatrices. Aujourd'hui, nos calculs sont désormais confiés à des automates (calculatrices électroniques, ordinateurs et micro-ordinateurs (dits individuels).
Cependant, ces automates, en dépit d'un tel nom, n'apprennent pas seuls. Ils ne peuvent opérer qu'en suivant des séquences d'instructions qui sont le fait de l'homme, en un mot des programmes (étymologiquement pro - graphô : j'écris à l'avance; sous-entendu : ce qu'il y a lieu de faire).
➔ Rappelons que le mot ordinateur fut proposé par Jacques Perret, linguiste, professeur à la Sorbonne, à la demande d'IBM France en 1955, en remplacement de l'anglais compute = calculer, computer = calculateur. Ce nouveau terme fut très vite adopté par les pays francophones (après être resté "propriété" d'IBM France). Il prend sa racine dans le mot latin ordinator = celui qui range, qui organise. Ce qui est nouveau, c'est la substantivation de l'adjectif ordinateur, ordinatrice, quoiqu'en religion on parle de Dieu, ordinateur du monde. On remarque que l'aspect calculatoire disparaît dans cette appellation au profit de l'organisation méthodique des données.
L'on peut comprendre alors l'intérêt que comporte l'usage de l'ordinateur pour l'acquisition du savoir mathématique. Pour programmer la résolution d'une équation, l'inverse d'une matrice, la recherche d'une racine nième et, plus généralement, tout processus conduisant à une solution où à un résultat, l'élève devra, d'une part, choisir une méthode (étymologiquement la voie à suivre : meth - odos) et d'autre part définir avec minutie et sans faille, toutes les étapes de cet itinéraire que devra suivre la machine, en un mot l'algorithme (Al Khwarizmi).
Le langage JavaScript : »
Le recours à l'ordinateur est donc
hautement formateur. Celui-ci libère l'esprit des calculs de
routine au profit de la réflexion et de l'imagination pour
concevoir et programmer l'algorithme pertinent. La relation à
la machine, quelle qu'elle soit, a toujours une portée
éducative. L'ordinateur l'a tout particulièrement,
à condition que l'élève ne s'en serve pas comme
d'un jouet, ou plutôt, seulement comme d'un jouet, car on ne
saurait nier la portée pédagogique des aspects ludiques
de l'ordinateur.
Mais celui-ci, en tant que machine à traiter l'information
exécute des opérations dont on pensait naguère
qu'elles étaient l'apanage de l'esprit humain.
L'élève constatera donc que l'esprit n'est pas dans le
calcul, mais dans la conception de la méthode de calcul. Cela
ne le conduira pas pour autant à mépriser le fait de
calculer par soi-même, qu'il s'agisse du calcul écrit ou
mental.
L'ordinateur appelle à une réflexion
sur les algorithmes de calcul (la division, l'extraction de la racine
carrée, les règles calculatoires : priorités,
associativité, etc.) et pourrait contribuer à
réhabiliter, par une meilleure connaissance de leurs
mécanismes, les méthodes de calcul rapide qui
étaient en faveur chez les ingénieurs, les comptables,
voire chez les mathématiciens.
L'élève va prendre aussi conscience, dans sa relation
avec la machine, notamment lorsqu'il écrira, et surtout,
testera le programme, de l'importance, dans le fonctionnement de
notre esprit, de l'implicite , du non-exprimé, du
non-élucidé, du présupposé.
En effet, l'ordinateur ne peut rien assumer du non-dit. Il n'est pas "circonspect" : il va droit devant lui. L'élève devra donc se demander si son programme qu'il croit bien conçu et bien construit, permettra à la machine d'atteindre le but. Il constatera que l'ordinateur peut parfois "divaguer" ou "piétiner" (comme dans le cas de l'usage de formules sommatoires ou de calculs par approximations successives) et qu'il faut alors approfondir la réflexion et affiner le programme.
L'algorithmique, dont les bases sont enseignées dès le lycée, voire au collège, est une branche commune à l'informatique et à la logique mathématique. De nos jours, la théorie de la complexité des algorithmes réunit les meilleurs spécialistes autour de la conjecture P = NP, un problème crucial au regard de l'omniprésence de l'informatique tant dans notre quotidien que dans des domaines aussi variés que l'industrie, l'économie, la médecine, la sécurité militaire ou bancaire.
Dans notre enseignement des mathématiques, il ne s'agira pas
de former des virtuoses de la programmation. L'objectif est de rendre
possible la communication entre l'élève et la machine
afin de résoudre un problème d'arithmétique,
d'algèbre, d'analyse ou de géométrie que les
logiciels commerciaux ne permettent pas d'appréhender.
En fait, résoudre n'est pas systématiquement l'objectif : l'usage principal de l'ordinateur en classe est la simulation -l'approche- d'un processus mathématique conduisant l'élève à émettre des conjectures et, par là, à suivre des pistes fructueuses de recherche : l'ordinateur ne se substitue nullement à la réflexion mathématique. Il apporte une aide dynamique dans le cycle essais-conjectures-vérification caractérisant la démarche scientifique. C'est un outil, un moyen de mieux orienter la pensée, non une fin.