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Suite de Padovan & nombre plastique (plastic number)

La spirale de Fibonacci s'inscrit dans une suite de carrés contigus. L'idée d'un architecte anglais, Richard Padovan (1935-), inspiré par la lecture d'un traité d'architecture de D. H. van der Laan (1904-1991), architecte et moine hollandais, auteur de Architectonic Space (1983) portant sur les proportions idéales des constructions fut de construire une suite d'entiers à partir de triangles équilatéraux placés en "colimaçon". cette nouvelle pensée architectonique fait concurrence à celle engendrée par la monomanie du nombre d'or dont l'architecte français Le Corbusier fut un adepte...

La suite en question, baptisée suite de Padovan par Ian Stewart dans L'Univers des nombres (» réf.1) conduit au nombre plastique, concurrent contemporain du nombre d'or...

 i  Ian Stewart, anglais, 1945-, principalement professeur de mathématiques à l'université de Warwick (Angleterre, membre de la Royal Society, Stewart enseigna également en Allemagne et aux États-Unis. Célèbre auteur de nombreuses publications de vulgarisation mathématique.

On trace maintenant des arcs de cercle consécutifs c1, c1', c1", c2, ..., de 60° d'ouverture dont l'ensemble forme une spirale comparable à celle de Fibonacci (et à celle, dite logarithmique, de Bernoulli).

Si un désigne la longueur du côté du triangle de rang n+1, on obtient :

La suite de Padovan est alors définie par :

uo = u1 = u2 = 1, et pour tout n : un+3 = un+1 + un    (ou bien  un+1 = un-1 + un-2)

Au moyen d'un tableur, il est facile d'écrire un programme utilisant la recopie vers le bas, calculant les termes successifs et les rapports qn = un+1/un :

A

B

C

D

E

1

n

u(n)

u(n-2)

u(n-3)

q(n)

2 0 1 /// /// ///

3

=A2 + 1 1

///

///

=B4/B3

4

recopier
vers le bas

1 1 /// recopier
vers le bas

5

  =C5+D5

=B3

=B2

 

6

  recopier
vers le bas

recopier
vers le bas

recopier
vers le bas

 

On obtient :

A
B
C
D
E
1 n u(n) u(n-2) u(n-3) q(n)
2 0 1 /// /// ///
3 1 1 /// /// 1
4 2 1 1 /// 2
5 3 2 1 1 1
6 4 2 1 1 1,5
7 5 3 2 1 1,33333333
8 6 4 2 2 1,25
... ...    ...
15 13 28 16 12 1,32142857
... ...   ...
50 48 525456 299426 226030 1,32471796
51 49 696081 396655 299426 1,32471796
52 50 922111 525456 396655 1,32471795
... ...   ...

On constate une convergence probable des qn vers 1,3247 environ. Posant, pour tout n ≥ 1 :

on a qn+1 = un+2/un+1 = (un + un-1)/un+1 = 1/qn + un-1/un+1 = 1/qn + un-1/un × un/un+1. donc :

qn+1 = 1/qn  +  1/qn-1 × 1/qn = 1/qn(1 + 1/qn-1)  avec  q1 = 1

Ce qui peut s'écrire :

n ≥ 1, qn+1 = (1 + 1/qn-1)/qn , q1 = 1

Le nombre plastique :    

Si la suite (qn) converge, sa limite P, P comme Padovan..., devra donc vérifier P = (1 + 1/P)/P, soit P3 = P + 1. La résolution de l'équation x3 - x - 1 = 0 conduit, au moyen de la formule de Cardan ou par une méthode de résolution approchée, comme la méthode dichotomique, à l'unique solution réelle de cette équation cubique :

Selon D. H. van der Laan (Architectonic Space, 1983), ce nombre, qu'il baptisa nombre plastique au sens des Arts et de la beauté architecturale, serait à l'espace tridimensionnel, ce que Φ, nombre d'or, est au plan.

    La notation noté Ψ (psi) pour le nombre plastique ici noté P est utilisée par Padovan dans son traité Proportion : Science, Philosophy, Architecture (» in fine). Il se réfère à la notation choisie par Gérard Cordonnier, un mathématicien et ingénieur français (1907-1977) qui, porté par le mysticisme s'intéressa au sujet en appelant alors nombre radiant ce nouveau nombre des mathématiques.

  Les nombres Φ et Ψ sont des nombres Pisot : »

Prouvons maintenant que la suite (qn) converge. On ne peut pas procéder comme dans le cas de la suite de Fibonacci au moyen car qn+1 est fonction de et qn mais aussi de qn-1. Exprimons alors P(n) au moyen d'une méthode analogue à celle rencontrée dans l'étude des suites récurrentes à deux termes : si une solution du type rn est solution de la récurrence un+3 = un+1 + un alors  r3 =  r + 1. La solution réelle de cette équation est P et elle admet deux solutions complexes conjuguées u et v = u (puisque ses coefficients sont réels).

Par linéarité, la suite P(n) = αPn + βunvn est aussi solution. La suite de Padovan étant parfaitement définie (unicité) par P(0) = P(0) = P(0) = 1, montrons qu'elle peut s'exprimer sous la forme P(n) = αPn + βun + γvn en résolvant le système :

α + β + γ = P(0) = 1
αP + βu + γv = P(1) = 1
αP2 + βu2 + γv2 = P(2) = 1

Le déterminant de ce système est un déterminant de Vandermonde :

Il est non nul puisque v = u est distinct de u et que P est réel. A la manière de la formule de Binet pour la suite de Fibonacci, on peut donc écrire P(n) de façon unique sous la forme αPn + βun + γvn.

   On remarquera, et il était bon de s'y attendre, que α, β et γ sont des nombres réels. Concernant par exemple α, en remplaçant la 1ère colonne du déterminant par la colonne des constantes, on obtient α = (1 - u)(1 - v) / (P - u)(P - v). Les développements du numérateur et du dénominateur sont fonctions de u + v = u + u et de uv = |u|2 qui sont des nombres réels. De même pour β et γ.

Revenons maintenant à l'équation r3 =  r + 1. La factorisation de r3 -  r - 1 est aisée :

r3 -  r - 1 = (r - P)(r - u)(r - v)

Par suite, Puv = 1, or P > 1, donc uv < 1. Mais v = u, donc |u| = |v| < 1. On en déduit que un et vn tendent vers 0 pour n infini. Par conséquent :

lim q(n) = lim Pn+1 + βun+1 + γvn+1) / Pn + βun + γvn) = lim αPn+1 / αPn = P

La suite des quotients de deux éléments consécutifs de la suite de Padovan tend vers P

Une belle formule pour P noté ici Ψ pour faire plus joli... :    

Eu égard à Ψ3 = Ψ +1, on peut écrire :

               

Une formule similaire pour le nombre d'or Φ : »


   Pour en savoir plus :

  1. L'Univers des nombres par Ian Stewart, Éd. Belin-Pour la Science, Paris - 2000

  2. Dom Hans van der Laan and the Plastic Number, par Richard  Padovan :
    http://www.emis.de/journals/NNJ/conferences/N2002-Padovan.html

  3. Architectonic Space : Fifteen lessons on the disposition of the human habitat
    par Dom H. van der Lahn, 1983, traduction française, 1989. Lecture partielle sur Google Livres :
    http://books.google.fr/books?id=6ix-c82BweoC&printsec=frontcover&dq=isbn:9004090207&hl=fr&sa=X...

  4. Proportion : Science, Philosophy, Architecture par R. Padovan, 1999. Lecture partielle sur Google Livres :
    http://books.google.fr/books?id=Vk_CQULdAssC&hl=fr&source=gbs_navlinks_s


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