ChronoMath, une chronologie des MATHÉMATIQUES
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Grand théorème de Fermat , cas n = 3      » cas n = 4  |  « petit » théorème

Il s'agit de prouver l'impossibilité d'obtenir, en nombres entiers non nuls, l'égalité x3 + y3 = z3, cas particulier, lorsque n = 3, du célèbre grand et dernier théorème de Fermat.

Apporter la preuve de ce résultat est long et assez difficile même si celle-ci relève, somme toute, de l'arithmétique dite élémentaire. J'ai emprunté l'essence de la démarche, en fait celle d'Euler et de Gauss, à Jean Itard dans son Que sais-je "Arithmétique et théorie des nombres" dont la référence est citée in fine. La difficulté réside dans l'étude de la représentation de la racine cubique d'une puissance troisième d'entier de la forme a2 + 3b2 par une forme semblable. La démonstration de la possibilité de cette représentation (nécessitant 4 pages...) est donnée par Kevin Brown, professeur de mathématiques, sur son site également référencé (en anglais).

   On se place désormais dans Z, ensemble des entiers relatifs, afin de pouvoir "jouer" sur la symétrie du problème. Si notre égalité ne peut avoir lieu dans Z, elle sera, a fortiori, impossible dans N. Quand on parlera de diviseur, il s'agira toujours, par définition, d'un entier naturel non nul.

1. Quitte à les diviser par leur pgcd, nous pouvons supposer que x , y et z sont premiers entre eux. Sous cette hypothèse, x et y sont premiers entre eux. En effet, si p est un diviseur premier commun à x et y, l'égalité x3 + y3 = z3 montre que p est un diviseur premier de z3. Mais les diviseurs premiers de z3 sont ceux de z. Donc p est un diviseur de z, ce qui est contraire à l'hypothèse. En fait, en écrivant x3 - z3 = y3  et z3 - y3 = x3, il apparaît que x, y et z sont deux à deux premiers entre eux.

2. Un seul des trois entiers x, y et z est pair. En effet, il n'est pas possible que les trois nombres x, y et z soient impairs car la somme ou la différence de deux nombres impairs est paire. Il est clair que x, y et z ne peuvent pas, tous trois, être pairs puisqu'ils sont premiers entre eux et parmi x, y et z, deux d'entre eux ne peuvent être pairs puisqu'ils sont premiers entre eux !

3. Eu égard à la condition 2 et au fait que nous travaillons dans Z, on peut supposer que l'entier pair est z. En effet, si x (resp. y) est pair, on change les signes de x et z et on échange ensuite leurs rôles.

4. L'équation x3 + y3 = z3 peut s'écrire :

z3 =  (x + y)(x2 - xy + y2) = (x + y)[(x - y)2 + xy]

Posons x = u + v et y = u - v. Loisible car x + y et x - y sont pairs : on a x + y = 2u et x - y = 2v. L'égalité ci-dessus s'écrit alors :

z3 = 2u(u2 + 3v2)

Comme x et y sont premiers entre eux, il en est de même des entiers u et v et ces nombres sont de parités différentes. Le nombre u2 + 3v2 est alors impair et z étant pair, z3 est divisible par 8. Ainsi, u est un multiple de 4. Posons u = 4t :  u est donc pair et v impair et :

z3 = 8t(16t2 + 3v2)

Il suit que t(16t2 + 3v2) est un cube. Afin d'aller plus avant, nous aurons besoin de deux résultats :

Lemme 1 (» preuve) :

Si un produit ab d'entiers premiers entre eux est un cube, alors chacun d'eux en est un

Lemme 2  (admis, preuve en réf.2) :

L'équation diophantienne X2 + 3Y2 = Z3, avec X et Y premiers entre eux, admet la solution X = a(a2 - 9b2), Y = 3b(a2 - b2) où a et b sont des entiers premiers entre eux.

   On peut d'ailleurs vérifier que [a2 + 3b2]3 = (a3 - 9ab2)2 + 3(3a2b - 3b3)2. Jean Itard prouve (réf.1) : si a et b sont premiers entre eux, tout diviseur impair de N = a2 + 3b2 peut également s'écrire sous cette forme. En particulier, si N est un cube impair, sa racine cubique qui est un de ses diviseurs impairs peut se mettre sous la forme énoncée.

5. Revenons à notre relation z3 = 8t(16t2 + 3v2); elle montre que t(16t2 + 3v2) est un cube. Le problème est maintenant de savoir si t et 16t2 + 3v2 sont ou non premiers entre eux. Soit d un diviseur commun à t et 16t2 + 3v2; d divisant évidemment 16t2, devra diviser 3v2. Mais v est impair, donc d aussi et divisant t, il divise u = 4t. Or u et v sont premiers entre eux; donc d = 1, sinon d = 3.

Concernant la dernière assertion, il est clair que a est pair et b impair : en effet, v = 3b(a2 - b2) est impair et il n'est pas possible que a soit impair et b pair vu que 4t = a(a2 - 9b2) est pair.

Soit maintenant m un diviseur commun à 2a et a - 3b; m est nécessairement impair (car a - 3b est impair); donc m divise a et par suite divise 3b mais aussi t; m ne peut être multiple de 3 sinon 16t2 + 3v2 sera divisible par 3 alors que d = 1. Par suite m divise b, donc m = 1 puisque pgcd(a,b) = 1 : 2a et et a - 3b sont premiers entre eux. Même conclusion quant à 2a et a + 3b.

Enfin si m est un diviseur commun aux nombres a - 3b et a + 3b, m est impair et divise leur somme 2a, donc m divise a et on est ramené au cas précédent.

On est ainsi en droit de poser (lemme 1) : 2a = Z3 , a - 3b = X3 , a + 3b = Y3 en remarquant que X3 + Y3 = Z3. Mais (XYZ)3 = 8t = 2u = x + y et vu que z3 = (x + y)(x2 - xy + y2), on a | XYZ | ≤ | z |, donc | XYZ | < | xyz | car | xy | > 1

Partant de l'équation x3 + y3 = z3 nous sommes ramenés à une équation semblable X3 = Y3 + Z3 en nombres entiers dont le produit, en valeur absolue, est inférieur au produit initial.

   Selon la méthode de descente infinie de Fermat : "par le même raisonnement, on aura ensuite un autre produit plus petit que le précédent et en continuant indéfiniment, on trouvera toujours des nombres entiers de plus en plus petits satisfaisant aux mêmes conditions. Mais cela est impossible, puisqu'un nombre entier étant donné, il ne peut y avoir une infinité de nombres entiers qui soient plus petits".

t(16t2 + 3v2) = 9w(48w2 + v2) et w est premier avec v

Par suite 9w et 48w2 + v2 sont premiers entre eux et leur produit est un cube. Chacun d'eux est donc un cube et w est multiple de 3 : on pose alors w = 3k ce qui conduit à :

27k(3 × 144k2 + v2) = 33k[3 × (12k)2 + v2]

k est alors un cube ainsi que le crochet 3 × (12k)2 + v2, 12k et v étant premiers entre eux (ne pas oublier que v est impair).

Tout comme précédemment, on est en droit d'écrire : 12k = 3b(a2 - b2) et v = a(a - 3b)(a + 3b), a et b premiers entre eux. Ainsi 4k = b(a2 - b2) et k étant un cube, 8k = 2b(a + b)(a - b) en est aussi un.

L'entier v étant impair, a l'est aussi ainsi que a - 3b et a + 3b. Par conséquent a - (a - 3b) = 3b est pair; c'est dire que b est pair. Dans ces conditions, il est facile de vérifier que 2b, a - b et a + b sont deux à deux premiers entre eux puisque pgcd(a,b) = 1.

Selon le lemme 1 : en posant Z3 = a + b, Y3 = a - b et X3 = 2b, on obtient l'égalité :

X3 + Y3 = Z3 avec | XYZ| 3 = | 8k | < | t |

Mais n'oublions pas que z3 = 8t(16t2 + 3v2), donc :

| XYZ| 3 < | z |3 et | XYZ | < | xyz | puisque | xy | > 1

Et on conclut comme dans le cas précédent.

Étude du cas n = 4, x4 + y4 = z4 :  » 

    Pour en savoir plus :

  1. Arithmétique et théorie des nombres par Jean Itard, Que Sais-je n° 1093, P.U.F. , Paris - 1963
  2. Preuve du lemme fondamental (lemme 2) par Kevin Brown :
    http://www.epmath.ir/BooksPapers/n001.pdf
  3. Cas n = 5 : on pourra se référer à : Revue Quadrature; n°22 - Grand théorème de Fermat, 1641 - 1994
    (entièrement consacré au célèbre théorème de Fermat-Wiles) - Ed. du choix - 1995.

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